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Ethique militaire : Soldat et chrétien ?

 
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Calvinius

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MessagePosté le: Jeu Nov 27, 2008 13:49    Sujet du message: Ethique militaire : Soldat et chrétien ? Répondre en citant

Prédication sur Luc 3.14 : « Le soldat chrétien ! »

Pasteur Vincent BRU
Aumônier militaire protestant des Ecoles de Saint-Cyr-Coëtquidan


A l’occasion de la cérémonie « Sabres et Casoars »
Samedi 09 novembre 2008


Chers frères et sœurs en Christ, chers amis, le texte que j’ai souhaité partager avec vous aujourd’hui nous parle du métier de soldat.
Il en parle simplement et avec une brièveté presque déconcertante, mais il le fait avec clarté et avec vérité.
Et j’aime assez cette idée, si chère aux Réformateurs, que la Parole de Dieu ne s’intéresse pas seulement au spirituel, aux choses célestes, au sacré, mais bien à notre vie toute entière, dans chacun de ses aspects.
C’est dire si la souveraineté de Dieu concerne l’ensemble de la réalité créée et que comme l’a si justement affirmé un théologien du siècle dernier : « Il n’est pas de domaine de la vie des hommes dont le Christ ne puisse dire, c’est à moi » !
La spiritualité chrétienne n’est pas une spiritualité désincarnée. C’est une spiritualité pour ce monde-ci, qui concerne notre vie ici-bas, notre vie terrestre, dans ce qu’elle a de plus concret, de plus terre à terre.

Notre texte donc nous parle du métier de soldat, et ce faisant, il nous livre quelques grands principes, les principes de bases, les principes fondamentaux de l’éthique chrétienne sur ce sujet précis, afin que ce métier-là soit exercé de façon conforme à ce qui est droit, à ce qui est juste.
Il y a une éthique biblique du militaire qui doit intéresser le soldat chrétien.

Alors que dit notre texte ?

Vous remarquerez tout d’abord qu’à la question des soldats « Que devons-nous faire ? », sous-entendu afin de nous conformer aux exigences du Royaume qui vient, Jean-Baptiste, contrairement à ce que l’on pourrait être tenté de penser, ne leur dit pas de renoncer à leur métier de soldat, de changer de métier en vertu de l’imminence du Royaume que le prophète avait annoncé en disant « De leurs épées ils forgeront des socs et de leurs lances des serpes… » !
C’est que le temps de la Parousie, le temps où Dieu fera toutes choses nouvelles et où le mal, la souffrance et la mort ne seront plus n’est pas encore venu.
Nous sommes encore, même après la venue de Jésus, et jusqu’à son retour glorieux, dans le temps de la patience de Dieu, ce temps où l’ivraie côtoie encore le bon grain, où le péché est bel et bien toujours une réalité et où le mal exerce son influence partout dans le monde et jusque dans nos propres vie, et en nous-mêmes.
Nous sommes dans le déjà et le pas encore du Royaume de Dieu, en vertu de quoi Jésus dit dans la prière sacerdotale : « Je ne te prie pas de les ôter du monde mais de les préserver du malin » !
L’Evangile ne nous invite pas à fuir le monde dans un ailleurs spirituel, désincarné, idéalisé, mais bien plutôt à être des témoins, ici et maintenant, du Royaume qui vient et qui est déjà là, et ce, dans tous les domaines de la vie des hommes.

Voilà bien la première grande affirmation, la première vérité qui ressort de notre texte.

Le militaire chrétien est bien un homme de ce monde-ci, marqué par la Chute, par le péché, par le mal, et c’est dans ce monde-ci qu’il est appelé à faire usage de la force armée, dès lors que la situation l’exige, de même que le Magistrat dont l’Apôtre Paul dit que ce n’est pas en vain qu’il porte l’épée pour punir le malfaiteur, étant au service de Dieu » (Romain 13.1ss).

Il n’est donc pas exclu pour le chrétien d’exercer le métier des armes.
Pour autant il y a quelques principes à respecter, et c’est là que notre texte nous intéresse.

Le premier principe, c’est celui qui ressort de la parole de Jean-Baptiste quand il dit aux soldats venus pour l’interroger :

« Ne faites violence ni tort à personne » !

Voilà qui peut paraître bien étonnant.
Est-il seulement possible d’exercer le métier de soldat sans faire violence ni porter tort à personne ?
Il semble bien que oui.
Il y a une manière d’exercer la force, de faire usage de la force armée sans pour autant s’inscrire en faux contre l’exhortation du Christ dans les Béatitudes : « Heureux les artisans de paix, ils seront appelés fils de Dieu » ! (Mt 5.9)

Il y a une manière d’être plus exactement un soldat de la paix, ou pour reprendre une expression du pape Jean-Paul II, une « sentinelle de la paix » !
Et il faudrait évoquer ici les principes développés par les théoriciens de la notion de « guerre juste », en particulier chez St-Augustin ou St-Thomas d’Aquin – mais Calvin dont nous nous apprêtons à célébrer le 500ième anniversaire de sa naissance, dit aussi des choses forts intéressantes à ce sujet -, et plus près de nous dans les conventions internationales de la guerre, les conventions de Genève qui définissent précisément l’usage légitime de la force armée, usage non coercitif, et en vue du maintien ou du rétablissement de la paix.
« Ne faites violence à personne » !

Autrement dit, ayez un comportement qui relève d’un emploi juste et proportionné de la force, que cela soit sur le plan individuel – la maîtrise de soi – ou bien dans l’usage de ses armes, afin de vaincre la violence – car c’est bien là le but – et non d’y ajouter.

C’est dire si la fonction militaire doit se conjuguer à une formation plus globale de la personne sur le plan éthique.
A ce titre je suis sensible à ce que dit le Général de Lardemelle dans le livret rouge qui définit le projet éducatif des Ecoles de St-Cyr-Coëtquidan :

« Plus que le savoir et le savoir faire, c’est le savoir être et le savoir penser qui leur permettront – aux élèves officiers – de savoir décider et d’inventer des solutions aux défis de demain » !

L’aumônier militaire que je suis ne peut que souscrire à une telle affirmation.

Le deuxième principe, la deuxième vérité sur laquelle notre texte attire notre attention, c’est la parole de Jean-Baptiste qui dit : « Contentez-vous de votre solde » !
Alors il y a là quelque chose d’intéressant pour les militaires que nous sommes, et ce, quel que soit notre grade, et donc aussi notre solde, à savoir qu’il ne faut pas plus choisir le métier des armes pour l’attrait de la violence, l’attrait du pouvoir ou de la force, l’attrait des armes, que pour l’attrait de l’argent.
Un soldat n’est pas plus un va-t-en-guerre dont le moteur premier de l’action est l’attrait des armes et de la violence, qu’un mercenaire qui choisit le métier des armes pour de l’argent.
Se contenter de sa solde – et cela implique que celle-ci soit suffisante pour que chacun puisse subvenir à ses besoins et vivre dignement, ce qui, il faut bien le dire, est loin d’être le cas dans certains pays, obligeant les militaires à se livrer à toutes sortes d’exactions et de pillages – se contenter de sa solde, donc, c’est une manière de remettre les choses à leur juste place, considérer que l’humain doit rester premier, et que, comme le dit Jésus dans le Sermon sur la montagne, la vie vaut plus que la nourriture, et le corps plus que le vêtement, et que l’on ne peut pas servir Dieu et mamon, c'est-à-dire le dieu-argent !
Plus exactement, l’Evangile nous exhorte à ne pas vivre sous la pression de l’argent et des biens matériels – encore qu’il ne s’agit pas non plus de ne pas s’en préoccuper du tout – mais plutôt, d’abord et avant tout, pour une motivation noble, vraie et profonde, à savoir l’amour de la paix, toujours à préserver, à reconstruire.
C’est l’aspiration à la justice et à l’amour du prochain, à la protection des faibles, qui doit être première dans l’exercice du métier de soldat, comme en témoigne, du reste, le code du soldat qui reflète, à bien des égards, le code antique de la chevalerie dont vous me permettrez de vous livrer quelques extraits :
- tu auras le respect de toutes les faiblesses et tu t’en constitueras le défenseur
- tu aimeras le pays où tu es né
- tu ne reculeras pas devant l’ennemi
- tu ne mentiras point et seras fidèle à la parole donnée
- tu seras libéral et feras largesse à tous
- tu seras partout et toujours le champion du droit et du bien contre l’injustice et le mal !
Le code du soldat ne dit pas autre chose quand il affirme :
- « Au service de la France, le soldat lui est entièrement dévoué, en tout temps et en tout lieu » !
- ou encore : « Maître de sa force, il respecte l’adversaire et veille à épargner les populations »
- « il obéit aux ordres dans le respect des lois, des coutumes de la guerre et des conventions internationales »
- Membre d’une communauté solidaire et fraternelle, il agit avec honneur, franchise et loyauté » !

Ainsi donc, les valeurs de l’abnégation, du service d’autrui, comme aussi du courage, de l’honneur, de la rigueur, mais aussi, pour nous chrétiens, de la foi, de l’espérance et de l’amour, voilà bien de quoi alimenter et nourrir la pratique du métier de soldat, afin d’œuvrer à l’édification d’un monde meilleur, porté par une ferme et joyeuse espérance.

Alors bien sûr, il peut paraître par trop utopique de penser cela, et de placer la barre si haut !
La cause peut sembler à certains par trop exigeante, voire même perdue d’avance, dans un monde ou règne de plus en plus la loi du plus fort, et où le matérialisme et l’individualisme règnent en maître.
Néanmoins, pour reprendre les propos d’un écrivain français contemporain que j’aime beaucoup, et je terminerai par là :

« Quand on représente une cause presque perdue, il faut sauter sur son cheval, sonner de la trompette, et tenter la dernière sortie, faute de quoi l’on meurt de vieillesse triste, au fond de la forteresse que personne n’assiège parce que la vie s’en est allée ailleurs » !

Amen !
_________________
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Calvinius

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MessagePosté le: Lun Déc 08, 2008 18:30    Sujet du message: Répondre en citant

Prédication à l’occasion de la cérémonie du 4e Bataillon, le 4 décembre 2008
Remise d’insignes de grade de la 13e Compagnie et des sabres de la 14e Compagnie
Pasteur Vincent BRU
Aumônier militaire Ecoles de Saint-Cyr-Coëtquidan


Textes :

Ephésiens 6.10-18 : « Les armes du chrétien »

Hébreux 4.12 : « l’épée de la Parole de Dieu » !


Chers frères et sœurs en Christ, chers amis, nous sommes réunis aujourd’hui à l’occasion de la cérémonie de remise d’insignes de grade de la 13e Compagnie et de la remise de sabres de la 14e Compagnie, toutes deux appartenant au 4e Bataillon de l’Ecole Spéciale Militaire de Saint-Cyr qui comptent, actuellement, notamment, 140 élèves polytechniciens.

C’est une cérémonie importante pour les élèves car elle marque une étape décisive dans l’apprentissage du métier d’officier, à travers la remise de leurs insignes de grade et de leurs sabres.

Pour ceux qui ont assisté au culte à l’occasion des 2S nous avons vu qu’à certains égards, le métier de soldat, et plus encore celui d’officier, pouvait être considéré comme une vocation.

Il y a une vocation d’officier : c’est-à-dire que pour être un bon officier, il faut y avoir été appelé, et puis il faut y avoir été préparé, formé, et pas seulement au niveau du savoir et du savoir faire – il ne s’agit pas seulement d’être de bons techniciens -, mais aussi, et même en tout premier lieu, le savoir être et le savoir penser, comme le souligne le livret pédagogique des Ecoles de St-Cyr-Coëtquidan.

Il faut prendre vraiment conscience de tout le poids, en terme de responsabilité et de service, que représente l’exercice de cette fonction d’officier.

Le fait même de commander d’autres hommes, parfois dans des conditions difficiles où la prise de risque est importante, implique, de la part de l’officier, une grande rigueur morale, une conscience aiguë de ses responsabilités, comme du reste le symbolise le fameux sabre qui sera remis aux élèves officiers, lors de la cérémonie de ce soir. Ce même sabre qui, pour les élèves des autres Ecoles, leur a été remis à l’occasion de la cérémonie « Sabres et Casoars » le samedi 8 novembre dernier.

I

La Bible, nous l’avons lu tout à l’heure, utilise souvent la symbolique de l’épée pour signifier certaines réalités, certaines vérités sur lesquelles je souhaiterais attirer votre attention aujourd’hui.

Vous aurez sans doute remarqué que dans les deux textes que nous avons lus, dans l’Epitre de l’Apôtre Paul aux Ephésiens et dans l’Epître aux Hébreux, c’est la Parole de Dieu, ni plus ni moins, qui est représentée, symbolisée par une épée, et quelle épée !
Hébreux 4.12 : « Car la parole de Dieu est vivante et efficace, plus acérée qu’aucune épée à double tranchant ; elle pénètre jusqu’à la division de l’âme et des moelles ; elle est juge des sentiments et des pensées du cœur. »

L’épée de la Parole de Dieu !

Nos épées à nous, ou nos sabres n’en constituent que de pâles reflets ! Mais des reflets tout de même !

Le sabre que porte l’officier dit quelque chose de la Parole de Dieu, renvoie, d’une certaine manière - en tout cas il est possible de porter ce regard-là sur celui-ci -, à la Parole de Dieu, c’est-à-dire à l’autorité de Dieu, qui s’exerce par sa Parole.

L’autorité de Dieu dont la Bible nous dit qu’elle est précisément le support, le fondement de toutes autres autorités dans ce monde.

C’est là ce qu’affirme l’Apôtre Paul au chapitre 13 de l’Epître aux Romains :

« Que tout personne soit soumise aux autorités supérieures ; car il n’y a pas d’autorité qui ne vienne de Dieu, et les autorités qui existent ont été institués par Dieu. » (Romains 13.1)

Vous voyez que la Bible n’a rien d’anarchique ! La façon dont l’Ecriture Sainte parle de l’exercice de l’autorité, ne saurait, en aucune manière, servir de base pour justifier une conception anarchique du pouvoir et de la société.

C’est même le contraire. Il y a une justification biblique, une justification divine à l’exercice de l’autorité : autorité politique ou militaire, celle du magistrat, celle que les parents exercent sur leurs enfants, du patron sur ses employés, de l’instituteur ou du professeur sur ses élèves, de l’officier sur ses subalternes…

L’Apôtre Paul poursuit :

« C’est pourquoi celui qui s’oppose à l’autorité résiste à l’ordre de Dieu, et ceux qui résistent attireront une condamnation sur eux-mêmes.

3 Les gouvernants ne sont pas à craindre quand on fait le bien, mais quand on fait le mal. Veux-tu ne pas craindre l’autorité ? Fais le bien, et tu auras son approbation,

4 car elle est au service de Dieu pour ton bien. Mais si tu fais le mal, sois dans la crainte ; car ce n’est pas en vain qu’elle porte l’épée, étant au service de Dieu pour montrer sa vengeance et sa colère à celui qui pratique le mal. »

Celui qui porte l’épée, c’est là le propos de l’Apôtre, détient son pouvoir, son autorité, de Dieu, et il est au service de Dieu « pour ton bien », comme le dit le verset 4, pour le bien de tout un chacun, le bien de la société toute entière, et ce, afin de lutter contre le mal, c’est-à-dire contre tout ce qui porte atteinte à la dignité de l’homme et à la vie, tout ce qui s’oppose à ce qui est juste et bon.

Le Réformateur français Jean-Calvin dont nous nous apprêtons, en 2009, à célébrer partout dans le monde le 500ième anniversaire de la naissance, a écrit ceci – c’est l’article 39 de la Confession de La Rochelle, confession historique des Eglises Réformées de France depuis 1559 :

« Nous croyons que Dieu veut que le monde soit dirigé par des lois et des gouvernements, afin qu’il y ait quelques freins pour réprimer les appétits désordonnés du monde. Nous croyons donc que Dieu a institué les Royaumes, les Républiques et toutes autres sortes de Principautés … et tout ce qui appartient à l’état de justice, et qu’il veut en être reconnu l’auteur. »

Et il poursuit en disant : « Il faut donc, à cause de Dieu, non seulement qu’on supporte que les autorités exercent la souveraineté de leur charge, mais aussi qu’on les honore et les estime d’un profond respect, les considérant comme ses lieutenants et officiers, qu’Il a établis pour exercer une charge légitime et sainte. »

Ainsi donc, porter l’épée, porter le sabre pour l’officier, celui du pouvoir temporel – à ne pas confondre évidemment avec le glaive spirituel de l’Eglise -, c’est exercer une haute charge dont chacun aura à rendre compte un jour devant Dieu, qui est Lui seul le souverain Gouverneur du monde, le Juge suprême, celui dont il est dit – c’est le verset 13 du chapitre 4 de l’Epître au Hébreux : « Il n’y a aucune créature qui soit invisible devant lui : tout est mis à nu et terrassé aux yeux de celui à qui nous devons rendre compte ».

L’officier chrétien sait et doit savoir mieux que quiconque ce que signifie, en terme de devoir, de service et de responsabilité le fait de porter l’épée !

Car c’est d’abord devant Dieu qu’il se sait responsable et c’est à Lui d’abord qu’il sait devoir rendre compte, et devra un jour rendre compte, au Jour du Jugement dernier.

II

Premier point donc, première vérité que symbolise l’épée ou le sabre : l’exercice de l’autorité, autorité qui détient sa légitimité de Dieu seul, et qui doit de ce fait être exercée selon le droit et selon la justice, et qui dans la mesure où elle est exercée dans cet esprit-là, selon ce qui est juste, doit être respectée et honorée par tous.

Car si l’épée est le symbole de l’autorité, elle est aussi, dans la Bible, celui de la justice et de la vérité, ou du moins se conjugue-t-elle toujours avec cette double exigence de justice et de vérité.

Dans son Epître aux Ephésiens, au chapitre 6, Paul exhorte les croyants à se fortifier en portant toutes les armes de Dieu.

11 « Revêtez-vous de toutes les armes de Dieu » dit-il, « afin de pouvoir tenir ferme contre les manœuvres du diable. »

Et au verset 13 : « Afin de pouvoir résister dans le mauvais jour et tenir ferme après avoir tout surmonté. »

L’Apôtre énumère ensuite la panoplie du chrétien en reprenant toutes les pièces d’armure des soldats romains de l’époque.

Ayez à vos reins la vérité pour ceinture !
Revêtez la cuirasse de la justice !
Mettez pour chaussures les bonnes dispositions que donne l’Evangile de paix !
Et en toutes circonstances, prenez le bouclier de la foi avec lequel vous pourrez éteindre tous les traits enflammés du Malin !
Et au verset 17 : « Prenez aussi le casque du salut et l’épée de l’Esprit, qui est la Parole de Dieu. »

Détenir un pouvoir, une autorité ne suffit pas. Ce n’est pas une fin en soi. Le port de l’épée, ou du sabre pour l’officier, ne suffit pas pour faire de lui un bon officier, un officier selon le cœur de Dieu !

Encore faut-il se ceindre de la ceinture de la vérité, et revêtir la cuirasse de la justice !

La vérité et la justice dans ses rapports avec les autres, et d’abord avec Dieu, et aussi avec lui-même. Être vrai, authentique, sans duplicité, avoir le regard clair, savoir ce que signifie la fidélité et l’honneur !

L’Apôtre ajoute à cette double exigence, la vérité et la justice – auxquelles on peut conjoindre la droiture, la fidélité et la rigueur à la fois intellectuelle et morale -, celle de l’Evangile de la paix symbolisé par les chaussures, la paix et la miséricorde, la bienveillance, la compassion, et aussi le bouclier de la foi, qui vient à bout de tous les obstacles – et il y en a dans le métier de soldat ! Et le casque du Salut ! Salut qui ne vient que de Dieu seul, car Lui seul est le Sauveur !

Les élèves de l’Ecole Spéciale Militaire, qui porte le fameux Casoar, en plus du sabre, avec ses plumes blanches, symbole de pureté et d’humilité dans le service, et rouges, symbole du sacrifice librement consenti, peuvent je pense avoir une certaine idée de ce que l’Apôtre Paul exprime ici lorsqu’il parle du « casque du salut » !

La vérité, la justice, l’amour de la paix, la foi – et nous pourrions ajouter l’espérance et l’amour selon 1 Corinthiens 13 – voilà à quoi les officiers chrétiens que vous êtes sont appelés, telles sont les valeurs qui doivent vous porter, et je dirai, emporter aussi votre enthousiasme comme aussi l’enthousiasme de ceux qui sont ou seront placés sous vos ordres.

Telles sont les valeurs, les convictions qui doivent vous animer et transparaître dans chacune de vos paroles, dans chacun de vos actes, dans votre façon d’exercer l’autorité qui vous est confiée.

III

Autorité qui n’est pas synonyme de tyrannie, mais de service.
Et c’est la mon troisième et dernier point.

Il est possible d’établir une distinction – certains philosophes le font - entre le pouvoir, ou du moins une certains compréhension du pouvoir, et l’autorité. Le pouvoir, en particulier le pouvoir politique, est trop souvent exercé à des fins égoïstes, voire prométhéennes, c’est-à-dire dirigé contre Dieu lui-même – je pense ici à la devise révolutionnaire « Ni Dieu, ni Maître » ! C’est le mythe du surhomme dont parle Nietzche. L’homme révolté, qui, à l’instar de Satan, du Diable, n’a de cesse de rechercher la gloire et la puissance personnelles, le pouvoir, afin d’asservir, par la violence, les peuples à sa volonté, et d’être adulé comme un dieu. Songez à un Hitler, ou à un Staline, pour ne prendre que deux exemples récents, figures archétypales de l’anti-Christ, l’homme-dieu qui s’oppose ouvertement à Dieu et à son Règne d’amour et de paix pour y substituer celui du sang et des larmes, la tyrannie…

C’est la tentation des fils d’Adam depuis la Chute, le Péché originel, de manger de l’arbre défendu, l’arbre de la connaissance du bien et du mal, afin d’être comme des dieux, de rivaliser avec Dieu, voire même de prendre sa place, s’il était possible.

Ce n’est pas ainsi que l’officier chrétien doit vivre l’autorité qui lui est confiée.

C’est une autorité de service dont il s’agit.

« Que celui qui veut être le plus grand, a dit Jésus, sois le serviteur de tous ! »

Jésus, qui a montré l’exemple, lui a qui tout pouvoir a été donné – comme le dit la finale de l’Evangile selon Matthieu : « Tout pouvoir m’a été donné dans le ciel et sur la terre » !

« Lui dont la condition était celle de Dieu » – nous lisons cela au chapitre 2 de l’Epitre de Paul aux Philippiens – « il n’a pas estimé comme une proie à arracher d’être égal avec Dieu, mais il s’est dépouillé lui-même, en prenant la condition d’esclave, en devenant semblable aux hommes… il s’est humilié lui-même jusqu’à la mort, la mort sur la croix. C’est pourquoi, Dieu la souverainement élevé… »

La Bible dit que l’humilité précède la gloire, et l’orgueil, la chute !

L’humilité dans le service ! et l’amour de l’autre, du prochain, dans l’exercice de l’autorité : voilà bien ce à quoi les officiers sont invités.

C’est là leur gloire, et leur honneur !

Et pour le chrétien, plus précisément, pour l’officier chrétien, être au service de Dieu, d’abord – Dieu premier servi ! disait Calvin -, de la France et du prochain ensuite : voilà qui constitue sa vocation, qui doit le remplir de joie et d’enthousiasme. Car c’est une belle et grande vocation !

Tout cela est compris, et symbolisé par ce sabre que vous portez, avec sa lame éclatante et pure, où se reflète la lumière, avec sa force, et la justice dans le combat.

Autrefois, les chevaliers chrétiens s’engageaient à venir en aide aux nécessiteux, aux faibles, à la veuve et à l’orphelin dont ils garantissaient la protection, fusse au péril de leur vie : c’était là tout le sens de la cérémonie de l’adoubement.

Je cite ici un extrait du code antique de la Chevalerie que le Chevalier chrétien s’engageait à respecter et à suivre scrupuleusement :
- tu auras le respect de toutes les faiblesses et tu t’en constitueras le défenseur ;
- et encore : tu seras partout et toujours le champion du droit et du bien contre l’injustice et le mal !

La Chevalerie médiévale a, je le crois sincèrement, et malgré les dérives qui ont pu exister à certains moments de l’histoire, beaucoup à nous apprendre sur la vocation du soldat, et plus particulièrement du soldat chrétien, et plus particulièrement encore de l’officier chrétien.

Notre monde a besoin de ces héros, de ces hommes et de ses femmes capables de nager à contre-courant de l’individualisme et du matérialisme ambiants, des hommes et des femmes qui puissent avoir vraiment valeur d’exemples par la hauteur de leur idéal, la grandeur de leur vocation, et leur force spirituelle et morale.

Notre monde a un urgent besoin de ces hommes et de ses femmes qui forcent l’admiration et le respect par leur sens aigu du service, de l’abnégation, de la droiture, comme aussi de l’espérance et de la foi.

Alors que Dieu vous soit en aide et soit Lui-même, plus encore que votre parrain de promotion, le Parrain suprême, dans la personne du Christ, en qui se conjuguent toutes nos espérances !

Amen
_________________
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Dernière édition par Calvinius le Mer Déc 10, 2008 8:43; édité 1 fois
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Calvinius

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MessagePosté le: Lun Déc 08, 2008 18:32    Sujet du message: Répondre en citant

Prédication à l’occasion de la cérémonie des « 2 S »

Pasteur Vincent BRU

Aumônier militaire Ecoles de Saint-Cyr-Coëtquidan



A la mémoire des officiers morts pour la France





Textes :



Matthieu 22.23-33 : « Dieu n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants »



Hébreux 11.1-2 ; 13-16 ; 32-40 ; 12.1-2 : « Les héros morts pour la foi »



Hébreux 13.7 : « Considérez la fin de leur vie et imitez leur foi » !



1 Timothée 1.18-19a : « Le bon combat »







Chers frères et sœurs en Christ, nous sommes réunis aujourd’hui à l’occasion de la cérémonie des « 2 S », et comme l’indique le carton d’invitation : « à la mémoire des officiers morts pour la France ».



Je vous avouerais que c’est pour moi un exercice nouveau puisque je n’avais jamais eu l’occasion jusque-là de célébrer ce type d’office religieux, à la mémoire des officiers morts pour la France.



Il faut bien être aumônier militaire aux Ecoles de St-Cyr-Coëtquidan pour avoir l’occasion de vivre cela !



Mais j’ai trouvé l’idée intéressante, en fin de compte, d’autant que j’ai pensé vous proposer d’élargir ce qu’il convient de considérer à certains égards comme un « devoir de mémoire », à tous ceux qui sont morts pour une cause juste, qui ont su mourir dignement, avec honneur, et dans la foi, comme du reste l’Ecriture Sainte nous y exhorte à plusieurs reprises.



Je pense en particulier à ce texte de l’Epître aux Hébreux que nous avons lu :



« Souvenez-vous de vos conducteurs qui vous ont annoncé la parole de Dieu ; considérez l’issue de leur vie et imitez leur foi » !



Je pense aussi, dans la même Epître, à tout le chapitre 11 où il est question des croyants de l’ancienne disposition de l’Alliance, de l’ « Ancien Testament » (Abel, Noé, Abraham, Isaac, Jacob…), qui constituent véritablement, selon les propres mots de l’Apôtre, c’est au chapitre 12, verset 1 : « une nuée de témoins » dont il nous faut imiter la foi.



Se souvenir, pour imiter ! Le souvenir ici a une valeur pédagogique, didactique : il s’agit d’honorer la mémoire de ceux qui nous ont quittés afin que leur vie, comme aussi leur mort, la façon dont ils sont morts et dont ils ont su faire face à la mort, aient, à nos yeux, valeur d’exemple.



La vie, et la mort !



Car la mort fait partie de la vie, nous le savons bien. C’est une réalité qui nous concerne tous, et à laquelle nul ne saurait échapper.



Faire mémoire donc des officiers morts pour la France : il y a trois réalités ici sur lesquelles je voudrais attirer votre attention.





1. Tout d’abord il est question des officiers qui sont morts pour la France.



C’est d’eux dont nous sommes invités aujourd’hui à nous souvenir, à faire mémoire, plus particulièrement.



Les Ecoles de St-Cyr-Coëtquidan forment de futurs officiers de l’Armée de Terre, et chacun sait bien ici de ce dont il s’agit lorsqu’on parle de ce rang, de ce statut, de cette fonction d’officier, mais peut-être devrions-nous oser aussi le mot de vocation ?



L’officier fait partie d’un corps d’élite qui est appelé à se singulariser par sa grande rigueur, à la fois physique, morale, et – pour nous autres chrétiens en tout cas - spirituelle.



Je pense qu’il n’est pas tout à fait exclu d’oser la comparaison entre la figure de l’officier – en particulier l’officier chrétien - et celle du pasteur, dans la Bible.



Il y a quelque chose qui se rapproche du sacerdoce, c’est à dire du service, du service du prochain, évidemment, mais aussi, en un certain sens, du service de Dieu, dans cette fonction d’officier.



Cela pourra paraître sans doute à certains aller trop loin que de dire cela, mais songez que le Réformateur Martin Luther ne disait pas les choses autrement quand il considérait que tout métier, et donc pas seulement ici celui d’officier, ni même celui de pasteur, d’homme d’Eglise, devait être considérer comme autant de vocations au service de Dieu, là où il nous a placé, par le travail qui est le nôtre.



Il y a donc une vocation d’officier, je le crois. Une vocation de soldat. Comme il y a aussi une vocation de pasteur, ou une vocation d’instituteur, de maître d’Ecole, de professeur d’université, de maître bottier ou de maître tailleur, ou que sais-je encore.



Tout métier – dans la mesure bien sûr où il s’agit d’un métier honnête conforme aux exigences de la Loi de Dieu - mérite d’être considéré comme une vocation, pour le service de Dieu et du prochain.



Il n’empêche que l’officier tout comme le pasteur – et c’est là que je trouve la comparaison intéressante – doit avoir, sans doute plus que quiconque, et en tout cas de façon sans doute plus forte, plus aigüe, le sentiment d’être là pour les autres, pour le service des autres, du prochain, comme aussi pour le service d’une cause, et ce, jusqu’au consentement de la mort.





2. Mourir pour la patrie. C’est là la deuxième réalité dont il nous faut parler maintenant.



Nous faisons mémoire des officiers morts pour la France, et ce faisant, nous osons croire qu’ils ne sont pas morts pour rien !



Il y a, nous le croyons, quelque chose de vrai dans ces vers de Péguy que vous connaissez sans doute – sinon vous ne seriez pas aux Ecoles de St-Cyr-Coëtquidan ! - :



« Heureux ceux qui sont morts pour la terre charnelle

Mais pourvu que ce fût dans une juste guerre.

Heureux ceux qui sont morts pour quatre coins de terre.

Heureux ceux qui sont morts d’une mort solennelle…

Heureux les épis murs et les blés moissonnés » !



Il y a quelque chose de vrai ici, dans ces vers, et cependant, attention !



Attention à ne jamais confondre ces « quatre coins de terre » dont parle le poète, cette « terre charnelle », que peut représenter pour nous notre pays, la France, avec la Patrie céleste, le Royaume de Dieu qui est la Cause par excellence, celle à laquelle toutes les autres causes doivent être, pour le chrétien, rapportées, et subordonnées même.



La France n’est pas le Royaume de Dieu !



La terre promise, ultimement, nous attend dans les cieux.



Dans la Bible, la nouvelle Jérusalem, la ville sainte descend du ciel – c’est le Livre de l’Apocalypse qui dit cela.



Quand le Christ reviendra dans sa gloire, alors il fera toutes choses nouvelles, et notre Patrie céleste apparaîtra dans toute sa splendeur.



Il n’empêche que notre pays, la France, cette France pour laquelle tant de soldats, tant d’hommes ont donné leur vie, notre patrie, cette terre qui nous a vu naître, cette terre avec tout ce qu’elle peut représenter pour nous, peut être, ici bas, considérée, et avoir vocation d’être comme une image, même floue, même pâle, même déformée, de ce Royaume qui n’est en rien une création d’homme.



Il est possible, pour le chrétien, d’œuvrer pour que la France, jadis considérée comme « fille ainée de l’Eglise », constitue un témoignage vivant du Règne de Dieu.



Après tout le Christ n’a-t-il pas exhorté ses Apôtres à « faire de toutes les nations des disciples en leur enseignant tout ce qu’il a prescrit » (Matthieu 28.19s) ?!



Nos coins de terre valent la peine qu’on se batte pour eux, dans la mesure où ils représentent en définitive bien plus que simplement un espace géographique : nos officiers ne sont pas morts que pour ça, ils ont consenti au sacrifice de leur vie pour une idée aussi de la France, pour une idée de la liberté, une idée de la paix, une idée de ce qu’est la justice et le droit, contre la tyrannie, l’esclavage, l’oppression et l’injustice.



Il vaut la peine quand la situation l’exige, hélas ! de se battre et de mourir pour cette cause-là.



Il y a une certaine dignité dans cette mort-là, une mort qui à terme est appelée à porter du fruit béni, selon la parole de Jésus : « En vérité, en vérité je vous le dit, si le grain de blé qui est tombé en terre ne meurt, il reste seul, mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruit. » (Jean 12.24)



Alors bien sûr vous avez peut-être en mémoire cette célèbre chanson de notre bien-aimé Georges Brassens national, que j’aime beaucoup : « Mourir pour des idées ».



Je cite :



Mourir pour des idées, l’idée est excellente

Moi j’ai faillit mourir de ne l’avoir pas eu

Car tous ceux qui l’avaient, multitude accablante

En hurlant à la mort me sont tombés dessus.

Ils ont su me convaincre et ma muse insolente

Abjurant ses erreurs, se rallie à leur foi

Avec un soupçon de réserve toutefois

Mourrons pour des idées, d’accord, mais de mort lente,

D’accord mais de mort lente.



Voyez-vous frères et sœurs, la réalité est souvent ambivalente. Il faut se méfier des discours par trop simplistes, réducteurs, manichéens, de cette folle prétention que peuvent avoir certains à ériger leurs convictions en absolus, sans souffrir la moindre contradiction, la moindre nuance à leurs propos.



La vérité a souvent plusieurs facettes, qu’il importe de considérer ensembles, pour s’en faire une juste idée.



A tel enseigne que l’on peut parfois affirmer une chose, et, non pas son contraire, cela serait absurde, irrationnel, comme on le voit dans le relativisme moderne, mais simplement, il s’agit d’aborder cette même vérité sous un autre angle, selon une perspective différente, afin d’apporter une note de nuance, nécessaire, pour trouver l’équilibre.



Ainsi, il me semble que Georges Brassens a en partie raison, dans cette chanson, comme il a aussi, à mes yeux, en partie tort, d’un point de vue chrétien.



Je pense en particulier quand il dit au 3e couplet :



Des idées réclamant le fameux sacrifice

Les sectes de tout poil en offre des séquelles

Et la question se pose aux victimes novices

Mourir pour des idées, c’est bien beau, mais lesquelles !



C’est vrai, il ne s’agit pas de donner sa vie, de consentir jusqu’au sacrifice de sa vie, pour n’importe qu’elles idées.



Péguy du reste, vous l’aurez noté, ne dit pas autre chose quand il dit :



Heureux ceux qui sont morts pour la terre charnelle

Mais pourvu que ce fût dans une juste guerre.



L’Apôtre Paul exhorte le jeune Timothée à combattre « le bon combat », nous l’avons lu tout à l’heure !



Certains combats, certaines guerres ne sont pas bons, ne sont pas justes, et il est vraiment inutile et vain de mourir pour ces combats-là !



Mourir pour une cause injuste ! A quoi bon ?



Et cependant, il y a des idées, qui, pour le chrétien, valent vraiment la peine qu’on se batte pour elles jusqu’au sacrifice ultime : l’Evangile vaut la peine qu’on se donne corps et âme pour lui, la Bonne nouvelle de la Résurrection et du Salut gratuit en Jésus-Christ pour tout homme qui croit ! Une certaine idée de la justice aussi, de la liberté, au-delà même des convictions proprement religieuses.



Beaucoup d’hommes ont consenti à aller jusqu’au sacrifice de leur vie pour ces idées-là. Ils méritent d’être saluer pour cela.



Mourir pour sa patrie ? Et pourquoi pas ? Même si cela peut paraître assez inconcevable pour certains aujourd’hui, dans notre société matérialiste et individualiste, mais s’il s’agit de défendre la vie, s’il s’agit de préserver ceux qui nous sont chers, nos enfants, d’un plus grand mal que la guerre elle-même, comme lors de la dernière guerre mondiale, par exemple, contre la folie meurtrière et inhumaine de l’idéologie nazie ?



Qui pourrait le nier ?



Il nous faut aujourd’hui honorer vraiment les officiers et même tous les soldats qui sont morts pour cette idée-là de la France, qui sont morts dignement, oui, avec honneur, avec courage, avec un total don de soi, non pas par amour de la guerre – un chrétien doit haïr la guerre disait St Augustin – mais par amour de la paix, amour de cette terre qui les a mis au monde, dès lors qu’elle se trouve menacée par des forces maléfiques, destructrices, et quand bien même il importe aux politiques notamment de tout faire pour éviter d’en arriver à cette extrémité terrible de la guerre !



Quand elle est là, quand elle devient un mal nécessaire, parce qu’un moindre mal, pour évincer un mal plus grand, alors il nous faut saluer avec respect tous ceux qui ont donné leur vie pour cette cause-là, et les imiter.





3. En même temps, il importe d’apporter, ici encore, une nuance. Consentir jusqu’au sacrifice de sa vie, c’est bien, quand la situation l’exige, quand la cause est juste, mais même dans ce cas-là, dans ces conditions-là, attention !



Attention de ne pas rechercher, en quelque sorte, la mort au combat, y compris le bon combat, comme si celle-ci avait, en elle-même, une valeur salvifique, comme pour gagner son salut, le mériter !



Il ne s’agit pas de courir à la mort, de l’attirer vers soi, comme s’il s’agissait par là de gagner sa vie, son salut, ou tout simplement un sens à sa vie par le don de sa vie, dans une sorte d’exaltation du sacrifice ultime.



Cela, Jésus-Christ l’a déjà et pleinement accompli à notre place par sa mort sur la croix !



A nous, aux vivants, il nous appartient de vivre, de préserver la vie, celle de nos enfants, de nos foyers, et la nôtre aussi, et de ne pas sombrer dans une forme d’idéalisation de la mort, comme s’il s’agissait de l’attirer jusqu’à nous avant même qu’elle ne vienne naturellement.



Et c’est là précisément le troisième point de ma prédication, la troisième vérité sur laquelle il me semble que le protestant que je suis et que vous êtes doivent être attentifs, car c’est peut-être une marque spécifique de notre identité protestante.



Le salut est gratuit : sola gracia disaient les Réformateurs !



La grâce seule !



Sola Fide ! La foi seule !



Le salut, l’entrée dans la vie éternelle, ne se mérite pas !



Il s’agit seulement de croire en Jésus-Christ, à son sacrifice expiatoire, propitiatoire, à sa mort substitutive comme l’a si brillamment exposé le grand théologien du Moyen Age Saint Anselme de Cantorbéry dans son Cur deus homo (« Pourquoi le Dieu homme », autrement dit pourquoi a-t-il fallut que Dieu s’incarne en Jésus-Christ, devienne un homme et meurt sur une croix ? » : Christ a pris la place du pécheur, il a offert sa vie à Dieu, pour la Cause par excellence : le Salut de l’humanité !



Il valait la peine que le Christ meurt pour cette cause-là, ne croyez-vous pas ?



Et puisque nous y sommes, c’est d’abord à Lui qu’il convient de rendre hommage aujourd’hui.



Toute autre mort, tout autre sacrifice ne peut être que subordonné à cette mort-là, à ce sacrifice-là, tout en gardant toujours à l’esprit que nous ne pouvons ajouter quoi que ce soit à la valeur de ce sacrifice. Notre mort même n’y ajoute rien : il est parfait, il est entièrement et pleinement satisfaisant pour Dieu, pour les exigences de la Loi.



Dieu a satisfait lui-même, par son propre sacrifice, car Jésus-Christ est Dieu ! aux exigences de sa Loi, de sa Justice.



Le Salut est un cadeau qu’il nous faut recevoir les mains vides !



Crois seulement et tu seras sauvé !



Alors il nous faut vivre ! Il nous faut être reconnaissants à Dieu pour le don de la vie !



Attention à la tentation d’une forme de suicide individuel ou collectif où l’on chercherait une quelconque réalisation de soi dans le sacrifice ultime de sa vie, avec l’idée de gagner son Ciel, comme c’est notamment le cas des kamikazes, à ne surtout pas confondre avec les martyrs chrétiens - il s’agit là de deux réalités radicalement différentes -, ou même de certains combats dont on sait pertinemment bien qu’ils sont perdus d’avance… tandis que bien des morts pourrait et aurait pu être évité dans l’histoire.



Et encore je ne parle pas de ces combats-là, qui depuis la nuit des temps, n’ont vu le jour que pour assouvir la soif de pouvoir de certains grands de ce monde, aux appétits désordonnés. Il faut aussi le dire.



J’ai apprécié qu’à travers la représentation de la pièce de Jean Giraudoux, « La guerre de Troie n’aura pas lieu », le mois dernier, les élèves polytechniciens du 4e Bataillon aient eu l’audace de pointer du doigt cette réalité-là de la noirceur humaine, du cynisme non pas des militaires, qui ne font qu’obéir aux ordres, avec fidélité et honneur, mais des politiques qui préside trop souvent à tant de combats, qui auraient pu être évités, et qui peuvent l’être aujourd’hui encore, parfois, souvent.





Alors, pour conclure, je laisse là notre ami Georges Brassens, paix à son âme ! et je reprends les paroles de l’Apôtre Paul qui me semble quand même mieux exprimer, évidemment, la vérité de la Parole de Dieu sur notre sujet !



« Christ est ma vie, et mourir m’est un gain » ! (Philippiens 1.21)



Voilà qui dit tout !



Christ est ma vie ! Pouvez-vous dire cela frères et sœurs ?



Christ est l’ultime Cause, la Cause par excellent pour laquelle il nous faut vivre et mourir !



Tout en sachant que même la mort, ici, est pour les croyants, un gain !



Quand la mort vient, parce qu’elle doit venir, parce que nul ne peut y échapper, et bien, ne soyez pas comme ceux qui sont sans espérance et sans Dieu dans le monde comme le dit ailleurs l’Apôtre Paul.



Que ce soit la vôtre ou celle de l’un de vos proches, de votre enfant, de votre père ou mère, de votre époux, épouse, de votre ami, ne désespérez pas, osez l’audace de la foi !



La foi en la résurrection. La mort n’est pas pour le chrétien une porte close, c’est une fenêtre ouverte sur l’éternité.



« Car Dieu n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants » !



Et c’est un gain, oui, c'est-à-dire qu’en un sens il nous est avantageux de quitter ce monde-ci pour rejoindre le Christ dans son éternité bien heureuse où le mal et la mort ne sont plus !



Mais il est avantageux, aussi de ne pas quitter ce monde, il est avantageux de vivre, comme l’Apôtre Paul le dit aussi, à cause de l’amour, à cause des autres, à cause de ceux qui comptent sur nous, à cause du travail et de la vocation que Dieu adresse à chacun ici bas pour que le monde, notre monde, ici et maintenant, soit meilleur et que nos enfants vivent dans la paix et la sécurité, et l’amour.



Alors pour finir, saluons oui la mémoire de nos officiers morts pour la France, faisons mémoire de celles et ceux qui ont offert leur vie pour une cause juste.



Ne prions pas pour eux, car en protestantisme, cela ne se fait pas, il n’y a pas de prière pour les morts dans la Bible, mais imitons leur foi, et prions pour les vivants, en particulier ceux qui ont connu la mort de l’un de leurs proches, au combat.



Pensons à ces familles endeuillées de ces soldats morts en Afghanistan et ailleurs, à ces enfants orphelins qu’ils ont laissé.



Prions pour que la paix règne dans notre monde torturé, pour que le Règne de Dieu vienne, que sa volonté soit faîtes sur la terre comme au ciel !



Voilà de quoi nourrir cette célébration que nous voulons vivre aujourd’hui au sein de cette Ecole qui forme nos futurs officiers, et qu’ils se souviennent, le jour où ils devront regarder la mort en face, au champ d’honneur, qu’ils ne mourront pas en vain, s’il le vivent bien dans cet esprit-là de la foi, de l’espérance et de l’amour auxquels l’Evangile nous invite.



Amen !
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" Il n'est pas de domaine de la vie des hommes dont le Christ ne puisse dire : "c'est à moi"" (Abraham Kuyper)
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