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Pierre

Invité





MessagePosté le: Lun Avr 03, 2006 19:07    Sujet du message: Répondre en citant

Je remercie Vincent d’avoir eu la lucidité et la simplicité de vous répondre, messieurs à vos questions.

Voici deux autres articles.


IRAK, ETATS-UNIS, 2003

De quelques réflexions inopportunes...

Dans ce conflit, la "droite nationale" a pris, à la quasi-unanimité, position contre les États-Unis, réclamé le désarmement de l'Irak par la voie des "inspections de l'ONU", demandé le "respect du droit inter¬national" et des résolutions de l'ONU. S'il est exact que cette position est la sienne depuis 1991, elle ne s'en est pas moins retrouvée dans le "consensus national" actuel, ce qui laisse un sentiment de malaise. L'électorat national est, comme l'a montré un sondage, divisé sur la question. C'est la raison de ces quelques réflexions qui n'ont pour but que d'ouvrir un débat sur une situation qui a toutes les chances de durer et même de connaître de nouveaux développements.

LE "DROIT INTERNATIONAL" N'EST PAS LE DROIT DES GENS

1. Que la droite nationale ait plaidé pour le respect des "résolutions de l'ONU" est, de sa part, un étrange oubli de la nature philosophique de l'ONU (maçonnerie mondialiste et théosophique) et de l'idéologie qui sous-tend le droit international actuel, lequel n'a plus rien à voir avec le droit des gens de Grotius mais repose sur la "théorie pure du droit international", développée dans les années soixante par l'autrichien Hans Kelsen (ancien juriste nazi !). Sa théorie affirme l'autonomie complète des normes de droit international produites par les organisations internationales, normes qui s'imposent, y compris de manière contraignante, aux États-nations, qui deviennent des sujets mineurs du nouveau droit international. La doctrine de Kelsen est le support juridique du Nouvel Ordre Mondial dont l'ONU, l'UNESCO, le FMI et autres organisations sont les acteurs opérationnels.

LE CONSENSUS MALSAIN

2 Avoir participé, sans être audible, au consensus « de Le Pen à Krivine » est d'autant plus étonnant que les "manifs contre la guerre" du printemps 2003 ont été présentées par la presse stipendiée comme la suite des manifs anti-Le Pen du printemps 2002, ce qui est exact sur le plan idéologique. Le fait que Chirac soit le parangon du "camp de la paix" aurait dû renforcer la méfiance. Comme "l'Homme du 18 juin", il préfère le monde communiste à la solidarité occidentale et l'arabo-islamisme à la présence outre-mer des Européens.

L'ANTIAMÉRICANISME EST BOLCHO-TROTSKISTE

3 L'antiaméricanisme est aussi une position très ambiguë. Il a été des décennies durant, ne l'oublions pas, un cache-sexe du philo-soviétisme, quoi qu'on pense des maladresses de la politique américaine de 1947 à 1990. Étonnante position pour des anticommunistes de principe dont certains furent même Reaganomanes... On ne peut donc partager la haine bolcho-trotskiste de la super-puis¬sance américaine. Ce n'est pas aux États-Unis qu'il faut reprocher leur puissance, c'est à la France qu'il faut faire honte de sa faiblesse. Mourras ne reprochait pas à l'Allemagne sa puissance, il dénonçait inlassablement les risques que la République, par ses faiblesses (ses com¬plaisances aussi), faisait courir à la France face à la menace germanique.

UNE DONNE NOUVELLE DEPUIS LE 11 SEPTEMBRE

4 L'attentat contre les Twin Towers le 11 septembre 2001 a radicalement changé la donne internationale. Ne pas le comprendre est faire fausse route. S'il est exact que, depuis 1980, les États-Unis flirtaient avec l'islam radical, le réveil a été brutal, le changement de cap des politiques américaines aussi. Ils ont pris conscience, à leur manière et à travers le prisme étroit de leurs intérêts, que l'islam était un danger pour la paix mondiale. Saddam Hussein l'a confirmé en appelant la "rue arabe" au djihad. L'islam (qui signifie soumission à la "foi" du Propriété), libéré de la tutelle européenne et flatté par l'Occident (faute que partagent les États-Unis, c'est exact) pour ses ressources pétrolières et son hostilité à la chrétienté (ce dont se félicitaient milieux protestants et maçonniques internationaux), poussé par sa dynamique démographique tandis que les berceaux européens sont désespérément vides, présent par une immigration massive dans une Europe redevenue dar-el-harb, stimulé par l'échec de la modernisation des sociétés musulmanes, persuadé enfin que l'effondrement spirituel et moral de l'Europe lui donnent une chance historique de la reconquérir après des siècles d'arriération et de soumission, l'islam, donc, représente la menace immédiate, fondamentale, permanente à laquelle l'Europe et l'Occident doivent désormais faire face.

FACE AUX "DROITS DE L'HOMME", NOS RACINES CHRÉTIENNES

5 Ce ne sont évidemment pas "les droits de l'homme" qui permettront de faire race au système politico-reli¬gieux islamique. Pour contrer ce système totalitaire appuyé sur une croyance fausse mais globalisante, il n'y a place que pour une religion vraie inspirant complètement la vie individuelle et sociale de l'homme — la religion catholique —, et pour une identité européenne et française puisant dans ses racines carolingiennes. En d'autres termes, l'islam militant (et terroriste) est paradoxalement la chance d'une Europe décadente de retrou¬ver ses racines chrétiennes par le choc qu'il peut ou va lui infliger.

FOCALISER SUR LE PÉTROLE, C'EST RÉDUCTEUR

6 Le choc des civilisations est en marche. Sous ses apparences terroristes et américaines, le 11 septembre 2001 est le commencement d'un affrontement qui va durer une, voire plusieurs générations. Ne pas comprendre cela, c'est ne pas comprendre les grands enjeux de civilisation. C'est baigner dans un détestable "œcuménisme" libéral et une pan-religiosité onusienne promue depuis des décennies par les milieux mondialistes, milieux également hostiles à la souveraineté des nations. On ne peut, non plus, ramener ce conflit à la seule dimension du pétrole : c'était probablement vrai lors de la première guerre du Golfe, vrai encore avant le 11 septembre 2001. C'est très largement réducteur depuis.

LES ÉTATS-UNIS BARRAGE À L'ARABO-ISLAMISME

7 Il est vrai que l'enjeu est pollué par la manière dont les États-Unis l'abordent avec leur messianisme manichéen, leur absence de compréhension des civilisations, leur appareil militaire et de propagande. Tout cela ne doit cependant pas nous égarer delà question de fond. En tant que principale puissance occidentale (contrairement à une "vieille Europe" ayant toutes les complaisances pour l'islam), et quelles que soient leurs erreurs de méthode, les Etats-Unis sont probablement aujourd'hui un barrage géopolitique à l'arabo-islamisme. Un barrage que Ton aimerait évidemment plus proche de saint Louis dans ses principes et dans ses méthodes que de Lincoln et de Bush, mais nous n'avons pas (plus) le choix.

L'ONU DÉCRÉDIBILISÉE, CHANCE POUR LES NATIONS

8 Dans ce conflit — personne ne l'a relevé —, l'ONU a été abaissée et ignorée, qui plus est, par les États-Unis, pourtant à l'origine (Charte de San Francisco) de la création du "machin". Or, les nations ne retrouveront leur souveraineté que quand l'ONU aura été décrédibilisée. Voilà une rupture qui ne peut que faire plaisir à des "souverainistes" : les nations vont pouvoir ignorer les injonctions venues du Palais de New York. On ne peut donc adhérer aux arguties villepinistes sur les prétendues violations du droit international : les nationaux auraient-ils oublié que la France fut, au nom de ce même "droit", condamnée pour sa présence en Algérie ?

LES ÉTATS-UNIS SONT NATIONALISTES

9 Les Etats-Unis ne sont pas au service du Nouvel Ordre Mondial... ou ils ne s'en font qu'un paravent à usage national. Ils mènent désormais une politique nationaliste déréglée, voire impérialiste, mais qui tourne le dos au multilatéralisme, comme on l'a vu ces der¬nières années sur plusieurs sujets d'importance (Cour pénale internationale, Conférence de Kyoto...). L'hyper-puissance actuelle des États-Unis — thalassocratie semblable à l'Athènes de la Ligue de Delos — les pousse à intervenir toujours plus loin pour faire prévaloir leurs seuls intérêts. La conséquence paradoxale est que l'ancienne colonie anglaise qui appuya les mouvements anticoloniaux européens au XXe siècle va se retrouver dans la situation de gérer directement des régions instables qu'administrèrent jadis les puissances européennes ! Ne nous trompons donc pas : les pires sectateurs du mondialisme sont les politiciens de l'Union européenne.

LA FRANCE AURAIT DÛ PRENDRE LA TÊTE DE LA CROISADE

10 Si la France doit s'impliquer au Proche et au Moyen-Orient, c'est uniquement pour protéger les minorités chrétiennes, comme les chaldéens en Irak. Pour le reste, elle devrait se féliciter que les États-Unis fassent le " job nécessaire et ingrat " (qu'elle aurait fait plus proprement, c'est vrai, si elle était restée fidèle à sa vocation de fille aînée de l'Église...). Mais c'est le fruit de son apostasie depuis des décennies. Si la France était restée fidèle à cette vocation, c'est elle qui aurait pris la tête de la Croisade à la demande du Pape — mais Jean-Paul II embrassa le Coran en présence du président de la Banque islamique irakienne, le 14 mai 1999 —, le Pape aujourd'hui invoqué par les Algériens comme le meilleur soutien du monde arabo-musulman avec "Chirac-Visa" !

NE PAS FLIRTER AVEC LE PACIFISME

11 Dans ce conflit irakien, il faut saisir le répit, peut-I être bref, qui nous est donné pour retrouver nos racines chrétiennes et nos origines carolingiennes. C'est pourquoi, à mon sens, la droite nationale ne peut, ni de près ni de loin, flirter avec le pseudo-pacifisme qui a en haine nos valeurs spirituelles et morales et nos racines culturelles, l'arabo-islamisme cher au Grand Orient, les gauches de toutes les ignominies, le gaullisme d'abandon et son avorton chiraquien.
T. M

……………………………………………………………………………………………………………………...

QUELQUES NOTES SUR LES OPPORTUNES RÉFLEXIONS DE T. M

Les réflexions de notre ami T. M, qui ne sont pas du tout « inopportunes », s'inscrivent dans le cadre du débat légitime sur l'affaire irakienne, entre personnes ayant les mêmes références nationales et chrétiennes. Comme on le voit, sa position sur le conflit est radicalement opposée à celle que nous avons développée dans R, que nous maintenons et maintiendrons. Les arguments de T. M nous permettent d'aller plus loin dans la réflexion, et de préciser cette position.

LE PRÉAMBULE contient des affirmations étranges. On peut parler de quasi-unanimité à propos des instances du Front national, mais pas du mouvement national dans son ensemble (voir Présent, par exemple). Le Front national n'a pas réclamé le désarmement de l'Irak par la voie des inspections (c'est la position de Chirac), car il n'a jamais cru que l'Irak possédât des armes de destruction massive. Quant au "malaise" qui résulterait du fait de se retrouver dans le "consensus" contre la guerre, j'avoue ne pas l'avoir ressenti une seconde. Comme le dit B. G, ce n'est pas parce que nous avons eu raison dix ans avant les autres que nous devrions nous taire. Ou, comme le disait B. A, à des journalistes : nous n'avons pas le romantisme de l'opposition à tout prix, et ça fait du bien de se retrouver, pour une fois, dans un consensus national.

LE DROIT DES GENS ET LA GUERRE JUSTE

1. L'origine "philosophique" de l'ONU n'a pas ici grand intérêt, pour deux raisons qui se rejoignent. D'une part, lorsque nous parlons de "droit international", ce n'est pas en référence à l'ONU, mais comme synonyme de "droit des gens". L'expression droit des gens, même si on la voit aujourd'hui resurgir (c'est un bon signe), n'est pas connue du grand public, tandis que celle de droit international est connue. Il se trouve qu'en l'occurrence le droit international de l'ONU correspond très exactement au droit des gens, c'est-à-dire à la loi morale naturelle. La guerre ne peut être "juste" que si elle répond, en dernier recours, à une agression. D'autre part, l'ONU a été conçue et réalisée en grande partie par les États-Unis, sous l'influence de l'idéologie que dit T. M. Mais, comme lui-même le constate par la suite, dans l'affaire qui nous occupe, les États-Unis se sont opposés à l'ONU. Ils ont ignoré les règles qu'ils avaient contribué à poser, pour faire leur guerre. On peut considérer, comme le fait T. M, qu'en se comportant ainsi ils ont affirmé leur souveraineté contre des normes internationales qu'ils n'acceptent plus, mais on peut considérer aussi qu'en violant le droit international ils ont violé tout simplement le droit des gens pour affirmer une force affranchie de toute loi.

CE QU'EST LE "CONSENSUS"

2 Ce n'est pas parce qu'on aboutit à la même conclusion qu'on part des mêmes principes. Ce n'est pas parce qu'on juge injuste la guerre en Irak qu'on est "pacifiste" et qu'on devient avec retard un thuriféraire du "mouvement de la paix" communiste. En ce qui concerne l'attitude de Chirac, quelles que soient ses motivations, elle a eu pour effet de replacer la France au premier rang de la scène internationale, ce qui est directement contraire à la propagande (y compris chiraquienne) selon laquelle la France ne peut exister que dans une Europe unie et forte. C'est la France qu'on a vue, alors que l'Europe implosait. Ce dont nous nous réjouissons.

PAS D'ANTIAMÉRICANISME

3 L'antiaméricanisme a été en effet le cache-sexe du philo-soviétisme, comme le mouvement de la paix était un instrument de l'impérialisme soviétique. Mais la "droite nationale" ne fait pas plus profession d'anti-américanisme que de pacifisme. Les États-Unis sont nos alliés, mais on n'est pas obligé d'être toujours d'accord avec ses alliés. L'allusion de T. M. à Maurras est très juste, il oublie seulement qu'en l'occurrence Maurras se retrouvait dans le consensus mené par la gauche pacifiste.

LA NOUVELLE DONNE : UN FAUX ARGUMENT

4 On connaît bien l'argument selon lequel les États-Unis auraient brusquement pris conscience du danger de l'islam le 11 septembre 2001. Il paraît avoir été inventé pour tenter de justifier la guerre en Irak. Oui, l'islam est une menace fondamentale. Mais alors on ne comprend pas que l'Arabie Saoudite ne figure pas dans la liste donnée par Colin Powell des six pays qui se rendent coupables des plus graves atteintes à la liberté de religion, alors que c'est le seul pays où toute autre manifestation religieuse qu'islamique soit strictement interdite, et que c'est le premier pays à financer la subversion islamique. Et il est étonnant d'aller combattre l'islam dans le seul pays arabo-musulman qui ait muselé l'extrémisme chiite et permis aux chrétiens de vivre leur foi sans entraves. On sait aussi que le pouvoir américain a fait croire à son peuple que c'est Saddam Hussein qui est responsable des attentats du 11 septembre : un mensonge d'autant plus absurde que la première intervention militaire contre Al Qaïda a été celle menée par l'armée irakienne contre un camp de cette organisation (à la demande des Kurdes).

ILS APPORTENT LES "DROITS DE L'HOMME" EN IRAK

5 En effet, ce ne sont pas les droits de l'homme qui permettent de faire face à l'islamisme. Or ce sont bien les droits de l'homme que les Américains prétendent apporter aux Irakiens, avec la "démocratie"...

LE PÉTROLE... ET ISRAËL

6 Le 11 septembre 2001 n'est un commencement que dans le cadre du douteux argument du revirement américain. Si les Américains étaient aveuglés par leur alliance avec l'islamisme, cela n'empêche pas que "l'affrontement" avait commencé depuis des années. Quant à la minimisation de la dimension du pétrole, elle ne peut que surprendre les lecteurs du livre Les États-Unis, le pétrole et la guerre, d'un certain T. M... Cela dit, le pétrole n'est en effet pas le seul motif de la guerre. L'autre grand motif est la protection d'Israël. La guerre en Irak (etc.) est largement le fait du lobby sioniste installé à la Maison-Blanche et au Pentagone.

LES ÉTATS-UNIS ATTISENT L'ARABO-ISLAMISME

7 Nous considérons quant à nous que les Américains, loin de se constituer en barrage à l'arabo-islamisme, attisent, par leur occupation de l'Irak, la haine de l'Occident dans tout le monde arabe et dans tout le monde musulman, du Proche-Orient à l'Asie du sud-est. Et il est désastreux que Bush se pose en chef chrétien de cette sinistre parodie de croisade.

AIDER L'ONU À ÊTRE CE QU'ELLE DOIT ÊTRE

8 Je ne crois pas que l'ONU ait été abaissée, comme s'en félicite T. M, en compagnie des "faucons" américains... et des libéraux (qui ne voient dans le droit international que de libres et changeants contrats entre les nations). L'ONU a montré où était le respect du droit des gens, donc de la souveraineté des nations. L'allusion à la condamnation de la France pour sa présence en Algérie est trop elliptique. La résolution de 1960 a été votée par les États récemment décolonisés, sous l'influence du tiers-mondisme soviétique. Elle posait en principe le droit du peuple algérien à l'autodétermination et à l'indépendance, mais le paragraphe sur un référendum ne fut pas adopté. T. M, pourrait ajouter que la Nouvelle-Calédonie figure dans la liste des pays à décoloniser. Il n'est pas question de nier les défauts de l'ONU. Mais la situation a changé depuis la fin de la domination soviétique sur une grande partie du monde, et elle ne peut changer qu'en bien avec l'affirmation des souverainetés nationales.

UN NATIONALISME DÉRÉGLÉ

9 Un exemple significatif du comportement des États-Unis est leur refus de la Cour pénale internationale, alors qu'ils avaient été les promoteurs des précédents tribunaux internationaux : ceux-ci étaient à leur entière dévotion, celle-là ne l'est pas. Les États-Unis montrent ainsi, en effet, qu'ils mènent une " politique nationaliste déréglée ", rejetant toute justice internationale et refusant toute limite à leur volonté de puissance. C'est un véritable recul de la civilisation. Rappelons que ce sont les papes qui ont concrètement inventé le "droit international" en intervenant dans les conflits pour faire respecter un minimum de justice entre les nations.

UNE FAUSSE CROISADE

10 La France ne peut pas se féliciter que les États-Unis fassent le " job nécessaire et ingrat ". Précisément parce qu'elle devrait se préoccuper du sort des chrétiens, selon sa vocation de protectrice des chrétiens d'Orient. Et plus précisément encore parce qu'elle a contribué à la constitution de l'Église chaldéenne, laquelle est menacée de mort par une "démocratie" qui mettra au pouvoir la majorité chiite, qui se vengera de chrétiens vus comme des collabos à la fois de Saddam Hussein et des Occidentaux "chrétiens" qui ont envahi le pays. Si la France était restée fidèle à sa vocation, elle n'aurait certainement pas pris la tête d'une fausse croisade contre un pays où les chrétiens pouvaient construire des églises et processionner dans les rues. L'attaque contre le pape ne me paraît de ce fait que plus déplacée.

AUCUN FLIRT

11 Si le fait d'affirmer nos convictions nous fait "flirter" avec la gauche, alors de son côté T. M, "flirte" avec les Roger Hanin, Bernard-Henri Lévy, Alexandre Adler, Bernard Kouchner et autres pétitionnaires de la subversion. Nous sommes évidemment d'accord pour affirmer que notre combat consiste à faire que notre peuple retrouve ses racines chrétiennes et ce que T. M, appelle curieusement ses "origines carolingiennes". À ce propos, non seulement Charlemagne ne fit pas de croisades, mais il fut le premier souverain occidental à nouer des relations diplomatiques avec un souverain arabo-musulman, en l'occurrence Haroun Al-Rachid, le calife de Bagdad...

Y. D
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Calvinius

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MessagePosté le: Lun Avr 03, 2006 20:44    Sujet du message: Répondre en citant

Citation:
Je remercie Vincent d’avoir eu la lucidité et la simplicité de vous répondre, messieurs à vos questions.


Une remarque tout de même. SRC est indépendant de tout parti, et n'a pas d'allégeance particulière avec quelque parti politique que ce soit. C'est aussi vrai, et peut-être même plus particulièrement vrai - étant donné les amalgames possibles - vis-à-vis du Front National. Dans la mesure où Pierre ne cache pas l'origine de certaines de ses sources, il me semblait important de le préciser...

PS : Sur le sujet qui nous intéresse je ne crois pas qu'il soit nécessaire pas plus qu'utile d'appeler le FN à la barre... Trop connoté. Evitons d'envenimer inuitilement le débat. Merci.
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Ours Martin

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MessagePosté le: Lun Avr 03, 2006 22:56    Sujet du message: Répondre en citant

Allons, allons, Vincent, il ne faut quand même pas se cacher derrière son petit doigt!! Comme je l'ai dit, les références de Pierre et ses thématiques suffisent largement à dire quel est son point de vue (surtout dans la mesure, cher Pierre, où vous semblez fuir le débat et laisser à notre ami Vincent le soin de nous répondre...de façon assez peu convaincante, mais bon, c'est autre chose Wink ).

J'aimerai notamment extraire du long texte envoyé par Pierre cette petite perle:
Pierre a écrit:
L'islam (qui signifie soumission à la "foi" du Propriété), libéré de la tutelle européenne et flatté par l'Occident (faute que partagent les États-Unis, c'est exact) pour ses ressources pétrolières et son hostilité à la chrétienté (ce dont se félicitaient milieux protestants et maçonniques internationaux)


aaaahh, le complot des protestants et des franc-maçons!! Vieux thème réccurent de toute une branche de l'extrême-droite française. Maurras parlait des 4 Etats Confédérés: Juifs, Protestants, Franc-Maçons, Métèques. A noter aussi que l'auteur du texte tend à impliquer que les protestants sont hors-chrétienté (laquelle, au passage, est morte depuis longtemps), et que les USA ne font pas partie de l'Occident.
Ces deux articles, je crois, montrent bien les tensions internes inhérentes aux milieux nationalistes français, partagés entre une tentation de l'alliance américaine et le rejet (général) du modèle de société incarné par les USA. Très intéressant, si je dirgeai un TD d'histoire contempo, je donnerai ça à étudier à mes étudiants.

Je n'ai pas de problème avec les références de Pierre, même si elles ne sont pas exactement les miennes. Je n'ostracise personne, et je trouve même sain que chacun puisse se tenir clairement sur ces positions. Mais il serait bon que notre forum ne soit pas récupéré par qui que ce soit.

Bon, puisque le Zouave Pontifical n'a pas manqué de poster des tonnes d'articles, le commando huguenot va faire de même:

Pipes considère la guerre d'Irak comme un succès
par Bill Steigerwald
Pittsburgh Tribune-Review
1er avril 2006
Version originale anglaise: Pipes calls war a success

Adaptation française: Alain Jean-Mairet

Pas étonnant que Daniel Pipes, expert du Moyen-Orient, se soit fait tant d'amis et d'ennemis politiques: ce chroniqueur conservateur, analyste de contre-terrorisme et auteur ou coauteur de 18 livres est aussi un ardent défenseur d'Israël et un critique acerbe de l'Islam radical.

Loué comme un «commentateur faisant autorité sur le Moyen-Orient» par ses alliés du Wall Street Journal, il est aussi qualifié d'«extrémiste anti-islamiste» par certains groupes arabo-américains. Il est également le fondateur du Forum du Moyen-Orient (www.meforum.org), lequel, entre autres, exploite un site Web nommé Campus Watch qui examine comment les études moyen-orientales sont enseignées dans les universités américaines.

Daniel Pipes sera l'un principaux orateurs, jeudi prochain, à la conférence de Grove City College intitulée «Mr. Jefferson Goes to the Middle East» qui réunira de très grands noms, les 5 et 6 avril, autour du thème de la promotion de la démocratie dans le monde arabe. Je me suis entretenu avec Daniel Pipe par téléphone depuis Sydney, en Australie.

Q: Étiez-vous en faveur de l'action militaire américaine en Irak et que pensez-vos de sa progression, ou de sa régression?

R: J'étais en sa faveur. Je continue d'approuver la campagne visant à éliminer le règne de Saddam Hussein et tous les dangers qu'il représentait pour les Irakiens, pour la région et pour nous. Depuis avril 2003, cependant, je plaide pour que le gouvernement américain et ses alliés poursuivent des ambitions plus modestes que ce n'est le cas actuellement. Pour que nous traitions les Irakiens comme des adultes; que nous comprenions que c'est eux, et non pas nous, qui doivent tenir les rênes de leur propre avenir, de leur propre destinée; que notre rôle en la matière est tout au plus consultatif et que nous devons être patients. Des ambitions plus modestes, donc, et davantage de temps.

Q: Cela signifie-t-il un changement notable de politique par rapport à ce que nous faisons actuellement? Devrions-nous annoncer des retraits?

R: Je ne souhaite pas parler en termes d'effectif, mais de placement et de rôle des troupes. Voilà trois ans maintenant que je critique l'affectation des troupes américaines – dans la médiation entre les tribus, l'aide à la construction de réseaux d'électricité, de supervision de construction d'écoles: tout cela me paraît constituer une utilisation inappropriée de nos forces, de notre argent. Les Irakiens devraient se charger de cela. Et nous devrions garder les troupes dans le désert, à surveiller les frontières internationales, à assurer qu'aucunes atrocités ne sont commises, que le pétrole et le gaz circulent. Et sinon laisser l'Irak aux Irakiens.

Q: Comment vous définissez-vous sur le plan politique?

R: Conservateur.

Q: N'êtes-vous pas l'un de ces néoconservateurs qui auraient convaincu Bush de partir en guerre au Moyen-Orient?

R: J'ai été qualifié de néoconservateur. Je ne sais pas en quoi exactement un néoconservateur diffère d'un conservateur.

Q: D'une manière générale, approuvez-vous la politique du président Bush au Moyen-Orient – ses objectifs, ses méthodes?

R: J'approuve les objectifs beaucoup plus que les méthodes. Je viens de donner l'exemple de l'Irak, où je pense que l'objectif qui consiste à débarrasser le pays de Saddam Hussein et tenter de promouvoir un Irak libre et prospère est tout à fait valable. Je critique la mise en œuvre. Il en est de même de la démocratie. Je pense que la démocratie est un excellent objectif pour la région. Je critique sa mise en œuvre – je pense que tout cela est trop rapide, trop américain, trop terminez-ça-pour-hier.

Q: Y a-t-il quelque chose de déterminant que l'administration Bush puisse faire pour faciliter les choses?

R: Nous avons fait une bonne chose en éliminant les talibans et en faisant chuter Saddam Hussein. Et c'est là l'ampleur de notre rôle, débarrasser le monde des régimes totalitaires malsains.

Permettez-moi d'ajouter que je considère en fait ces questions comme secondaires. Nous sommes engagés dans une guerre, une guerre profonde et longue, dans laquelle l'Afghanistan et l'Irak ne sont que des théâtres secondaires. Le véritable problème est la guerre que l'Islam radical, soit un phénomène d'envergure mondiale, a déclaré contre nous et qui dure déjà depuis de nombreuses années, et qui n'en est encore qu'à ses débuts. Voilà la vraie question centrale, majeure.

Q: J'ai parlé récemment avec Peter Galbraith et Ivan Eland, deux experts de politique étrangère qui soutiennent l'idée d'une partition en trois régions pour prévenir ou résoudre une guerre civile en Irak. Qu'en pensez-vous?

R: Et bien, les voisins sont unanimement contre cette solution, et les Irakiens la craignent, de sorte que je ne crois pas qu'elle ait des chances sérieuses.

Q: Quelle devrait être la politique des États-Unis au Moyen-Orient?

R: J'approuve la vision qu'a le président d'un Moyen-Orient qui ne serait plus, comme aujourd'hui, sous le joug de tyrans ou de despotes – d'autorités non élues dans le meilleur des cas. Mais c'est un projet de longue haleine, qui prendra des décennies, pas des mois, et qui doit être abordé dans cet esprit.

Deuxièmement, en allant trop vite, comme nous le faisons actuellement, nous favorisons l'arrivée au pouvoir de nos plus ardents ennemis, comme nous l'avons constaté de la manière la plus spectaculaire dans les territoires palestiniens, ou une organisation terroriste (le Hamas) remporta une majorité des voix palestiniennes. On peut aussi voir ce phénomène à l'œuvre en Afghanistan, en Irak, au Liban, en Libye, en Égypte, en Algérie.

Nous devons être très prudents et ne pas forcer la mise en route d'un processus avant que la population concernée ne soit vraiment prête à s'en servir – avant qu'elle n'ait dépassé ce que j'appelle la «tentation totalitaire», de sorte que s'y installe une vision du monde plus équilibrée, plus modérée, que celle qui y prévaut actuellement.

Q: Ils ont un grand retard à rattraper?

R: Pour prendre une analogie imparfaite: l'Allemagne traversa une période très malsaine entre 1933 et 1945. La situation du monde musulman n'est pas aussi mauvaise, mais elle est comparable. Ce monde traverse une période particulièrement malsaine. (…) Notre objectif est d'aider le monde musulman à dépasser cette guerre par des programmes éducatifs et autres. Au fond, nous sommes en guerre contre une forte minorité du monde musulman et nous sommes en guerre contre elle parce qu'elle a nous a déclaré la guerre et que nous devons répliquer.

Q: Quelle est la principale leçon que vous avez tirée de la guerre d'Irak?

R: L'ingratitude des Irakiens pour le service extraordinaire que nous leur avons rendu en les libérant de la tyrannie de Saddam Hussein. Ils ont très vite interprété cela comme le résultat de leur propre action, où nous aurions joué un rôle accessoire. Ils nous ont plus ou moins effacés du tableau.

Q: Quand saurons-nous si l'occupation ou l'invasion de l'Irak a été un succès ou un échec?

R: Oh, c'était bel et bien un succès. Nous avons éliminé Saddam Hussein. Le reste est décoration.

http://fr.danielpipes.org
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L'Ecriture sainte toute entière, du début jusqu'à la fin, indique et montre uniquement le Christ.
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Calvinius

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MessagePosté le: Mar Avr 04, 2006 8:45    Sujet du message: Répondre en citant

Citation:
Allons, allons, Vincent, il ne faut quand même pas se cacher derrière son petit doigt!!


Euh... je ne suis pas sûr de comprendre le sens de cette remarque. Qui se cache derrière son petit doigt ? Moi ??? On pourrait le comprendre comme cela en tout cas, même si je crois comprendre que cela s'adresse à Pierre.

Citation:
Je n'ai pas de problème avec les références de Pierre, même si elles ne sont pas exactement les miennes. Je n'ostracise personne, et je trouve même sain que chacun puisse se tenir clairement sur ces positions. Mais il serait bon que notre forum ne soit pas récupéré par qui que ce soit.


Nous sommes bien d'accords. Ce n'est pas dans mes habitudes de m'ériger en police des idées. Tous ceux qui participent à ce Forum doivent se sentir libre de défendre leurs opinions sans qu'on leur colle de suite une éthiquette. Je trouverais seulement extrêmement mal honnête de faire croire que le fait d'être contre la guerre en Irak implique nécessairement une allégeance plus ou moins déclarée avec les thèses du FN !!!! Encore une fois il y a des gens de tout bord qui déplorent cette guerre, pour de plus ou moins bonnes raisons. J'ai, pour ma part, essayé de ne retenir que les arguments qui me parraissent compatibles avec la vision chrétienne du monde et plus particulièrement réformée. Je déplore la tournure du débat et c'est pour cela que j'ai cru bon d'intervenir en disant que SRC est indépendant de tout parti politique existant afin qu'il ne nous soit pas fait un faux procès. Encore une fois, je serais gré à chacun de recentrer le débat en le dépolitisant. Le sujet de ce post est "la guerre juste", pas le nationalisme, le FN, l'anti-américanisme ou que sais-je encore...

Citation:
surtout dans la mesure, cher Pierre, où vous semblez fuir le débat et laisser à notre ami Vincent le soin de nous répondre...de façon assez peu convaincante, mais bon, c'est autre chose


Pour ma part j'attend toujours l'ombre d'une réponse sur la question des bombes à fragmentation - mines anti-personnel- et des bombes enrichies à l'uranium appauvri qui sont l'apanage de l'armée américaine et qui sont contraires au jus in bellum, sans parler du "tout aérien" et de ses nombreuses bavures vis-à-vis de la population civile...

Sinon merci pour ton article Thomas, dont j'apprécie le sens de la modération. Je pourrais faire mienne certaines de ses affirmations dont :

Citation:
J'approuve les objectifs beaucoup plus que les méthodes


Même si je formulerais les choses autrement, du genre : " Certains objectifs me parraissent défendables, les méthodes sont beaucoup plus contestables" Wink

Voilà qui peut contribuer à faire avancer la discussion. Je prépare une réponse en bonne et due forme Wink
_________________
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Augustinus

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MessagePosté le: Mar Avr 04, 2006 11:44    Sujet du message: Répondre en citant

Citation:
Pour ma part j'attend toujours l'ombre d'une réponse sur la question des bombes à fragmentation - mines anti-personnel- et des bombes enrichies à l'uranium appauvri qui sont l'apanage de l'armée américaine et qui sont contraires au jus in bellum, sans parler du "tout aérien" et de ses nombreuses bavures vis-à-vis de la population civile...


Approuvais tu la première guerre du Golf? Rolling Eyes Question
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Car sa colère dure un instant,
mais sa grâce toute la vie;
le soir arrivent les pleurs,
et le matin l'allégresse.

Psaume XXX.5-6
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Pierre

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MessagePosté le: Mar Avr 04, 2006 18:56    Sujet du message: Répondre en citant

En effet, pour ne pas commettre de confusions et autres amalgames liés a tout parti politique il est juste de se concentrer sur le sujet en gardant une vision chrétienne du monde et Réformée. Le « zouave pontifical » en question est au contraire un réformé baptiste.

Je m’en tiendrai et peut-être pour la dernière fois à ceci :

Le point de départ de notre réflexion est le document intitulé La stratégie de sécurité nationale des États-Unis d'Amérique (ci-après : la Stratégie), émis en septembre 2002 par la Maison Blanche à l'attention du Congrès '. Ce texte présente la manière dont le Président perçoit le rôle des États-Unis dans le monde, les menaces qui les guettent et la réponse qu'il convient de leur donner. Même s ' il ne dit pas tout (la politique internationale possède toujours sa face cachée, ses buts et ses actions inavoués), ce document nous a paru intéressant dans la mesure où il possède un caractère officiel et présente explicitement plusieurs éléments qui éclairent la politique internationale des États-Unis.
Après avoir présenté deux points de ce document qui méritent notre attention, nous tenterons de voir quels sont les fondements théoriques (philosophiques et théologiques) qui légitiment les éléments relevés en première partie. Pour ce faire, nous nous pencherons sur la doctrine chrétienne de la guerre juste. Nous constaterons d'abord que celle-ci ne peut en aucun cas fonder le discours développé dans la…Stratégie. Enfin, nous nous tournerons vers deux autres horizons de pensée qui permettent d'expliquer les points étudiés : le millénarisme américain et la conception hégélienne de l'histoire.
1. Deux points qui méritent discussion
Il s'agit de la manière dont le phénomène terroriste est interprété et de la théorie de la guerre préventive qui en découle.
1.1. L'interprétation du phénomène terroriste
Voici le principal extrait de la Stratégie qui traite du phénomène terroriste : La défense de notre pays contre ses ennemis est la première obligation, le devoir fondamental du gouvernement fédéral. Aujourd'hui, cette tâche a profondément changé. Les ennemis du passé avaient besoin d'armées puissantes et de grandes capacités industrielles pour mettre l'Amérique en danger. Aujourd'hui, de ténébreux réseaux d'individus peuvent semer le chaos et infliger de grandes souffrances sur nos rives pour un prix inférieur à celui d'un char d'assaut. Les terroristes sont organisés pour pénétrer les sociétés ouvertes et pour retourner contre nous la puissance des technologies modernes.
Afin de vaincre la menace, nous devons employer toutes les ressources dont nous disposons dans notre arsenal : la force militaire, une meilleure défense de notre territoire, l'application des lois, le renseignement, et de vigoureux efforts pour couper les ressources financières des terroristes. La guerre contre le terrorisme à grand rayon d'action est une entreprise de dimension mondiale et d'une durée incertaine. L'Amérique aidera les nations qui ont besoin de son appui à lutter contre le terrorisme. L'Amérique demandera des comptes aux pays qui sont compromis par la terreur, notamment ceux qui abritent les terroristes, car les alliés de la terreur sont les ennemis de la civilisation.
L'idée centrale de cet extrait est que le terrorisme est un phénomène guerrier qui appelle une réponse militaire. Depuis les événements du 11 septembre 2001, la lutte contre le terrorisme n'est plus avant tout une affaire de sécurité intérieure (qui n'exclut pas des collaborations internationales), mais une question de politique internationale. Ce changement d'approche représente un bouleversement : alors qu'avant, la lutte contre le terrorisme était avant tout une affaire de collaboration entre gouvernements (et services de renseignement) théoriquement souverains et égaux, les États-Unis s'arrogent à présent le droit de sommer différents pays de s'adapter aux requêtes américaines en matière de lutte anti-terroriste et de menacer ceux qui refuseraient d'entrer dans le cadre («L'Amérique demandera des comptes aux pays qui sont compromis par la terreur»). Telle est cette guerre «à grand rayon d'action» et «d'une durée incertaine» que le Président a déclarée à ceux qu'il considérerait comme favorisant l'action des terroristes. Ce bouleversement appelle deux corollaires. Le premier est la suppression de l'idée de souveraineté nationale2, puisque les États-Unis peuvent à tout moment s'ingérer dans les affaires intérieures d'un pays. Le second est l'impossibilité théorique d'être neutre : chaque État est en position de devoir potentiellement prendre position dans ce nouveau type de guerre3.
Cependant, force est de constater que le problème que tente de résoudre Bush par cette révolution est bien réel. Certains pays hébergent, financent, entraînent, etc. des réseaux terroristes et les gouvernements de ces pays ne sont bien évidemment pas intéressés à contribuer à l'éradication du phénomène selon les moyens traditionnellement utilisés (échanges d'informations, collaborations policières, etc.). Il est pourtant à craindre que le remède ne soit pire que le mal : en bafouant le principe de souveraineté nationale, les États-Unis s’arrogent théoriquement le droit d'intervenir militairement dans n'importe quel pays, pour la seule raison que celui-ci pourrait être «compromis par la terreur». L'exercice d'un tel pouvoir nécessiterait un désintéressement géopolitique complet, ce qui n'est pas la caractéristique principale de la politique internationale américaine. \^ Assemblée Interparlementaire européenne de sécurité et de défense résume le problème en relevant que «ce qui est précisément inquiétant est la propension des Américains à assimiler cette mission mondiale [la lutte contre le terrorisme] aux intérêts nationaux américains. Cela est clairement explicité dans les documents que nous venons de citer [ qui contiennent entre autres celui que vous venez de lire], les intérêts des États-Unis coïncidant toujours exactement avec ceux de l'humanité4.»
1.2. La guerre préventive
Cette crainte d'un exercice très subjectif d'un énorme pouvoir auto-attribué est renforcée par un autre élément du document :
Et par simple bon sens et légitime défense, l'Amérique agira contre les menaces ., émergentes avant qu'elles ne soient pleinement écloses. Nous ne pouvons pas ; i défendre l'Amérique et ses amis en nous bornant à espérer pour le mieux. Nous ', devons nous préparer à déjouer les desseins de nos ennemis par des activités de « renseignement optimales et des actions délibérées.
: L'idée est simple : il s'agit de frapper avant d'être frappé. Elle n'est effectivement pas dénuée de bon sens et peut être rapprochée de 1 ' adage populaire qui affirme que «la meilleure défense, c'est l'attaque». Le problème réside dans le caractère extrêmement flou du cadre donné à ces frappes préventives : «l'Amérique agira contre les menaces émergentes avant qu'elles ne soient pleinement écloses». Le discernement d'une menace émergente n'est déjà pas aisé, mais alors que dire lorsque cette menace émergente n'est pas pleinement éclose ? Le flou extrême qui entoure cette notion laisse là encore une énorme liberté d'interprétation d'une situation donnée, et avec un peu de mauvaise volonté, il est possible de dire de n'importe quel pays du monde qu'il représente une "menace émergente non encore pleinement éclose". Pour rester dans le domaine des adages populaires, la notion de guerre préventive présente le risque de s'apparenter rapidement à celui, stipulant que «qui veut noyer son chien l'accuse d'avoir la rage».
Ces deux éléments nous semblent particulièrement importants, car ils fondent théoriquement quasi n'importe quelle intervention des Américains à travers le monde. L'interprétation très élastique de ces deux principes lors du déclenchement de la guerre en Irak laisse présager que les États-Unis ne devraient pas s'arrêter là, à moins que l'enlisement actuel ne débouche sur une paralysie complète. Il importe d'analyser à présent plus en détail les fondements théoriques de ces deux principes d'action. Cette analyse sera d'autant plus utile que les Américains affichent constamment un grand souci de moralité dans l'action politique, et cela encore plus depuis que le Président Bush - qui se réclame explicitement de la foi chrétienne - est au pouvoir.
2. La doctrine chrétienne de la guerre juste
Dès les premiers siècles de notre ère, le problème de la légitimité de la guerre s'est posé aux autorités politiques chrétiennes. Une nation qui se dit chrétienne peut-elle faire la guerre ? Et si oui, à quelles conditions et dans quel cadre ? Saint Augustin au Ve siècle, puis saint Thomas au XIIIe ont posé les fondements de la doctrine chrétienne de la guerre juste. Cette doctrine a été développée et précisée au XVIe siècle, notamment sous la pression des guerres de religion qui sévissaient en Europe. Voici les six principaux critères qui ont été retenus par la tradition pour dire d'une guerre qu'elle est juste :
Le premier critère est que la décision soit prise par l'autorité légitime. Le second est que la cause soit juste, c'est-à-dire que l'ennemi potentiel ait causé, cause ou s'apprête à causer au pays un tort incontestable, grave et durable. Le troisième est que l'intention soit droite, en d'autres termes que le • but final de la guerre soit la paix, et une paix qui incorpore le bien de 1 ' ennemi vaincu. Cela exige des belligérants un comportement mesuré évitant les destructions inutiles durant le conflit et les actes de vengeance après. [...] Trois autres critères s ' aj outeront par la suite [ndr. : au XVIe siècle. Au paragraphe précédent, l'auteur parle essentiellement des principes développés par saint Augustin et saint Thomas]. Le premier, dit du dernier recours, veut qu'avant de déclarer la guerre on ait recouru à tous les moyens pacifiques de régler le conflit -arrangements diplomatiques, arbitrage, etc. - et que tous aient échoué. Le second critère est celui de la proportionnalité, selon lequel la guerre ne doit pas causer plus de dégâts et de malheurs que ceux qu'on veut éviter en la déclarant. Troisième et dernier critère, il ne faut pas se lancer dans une guerre, ni résister à une attaque si l'on n'est pas raisonnablement sûr de réussir l'opération. C'est le principe dit de l'espérance de succès 5.
Si l'on évalue les points de la politique américaine décrits ci-dessus à la lumière de cette théorie pluri-séculaire de la guerre juste, force est de constater l'existence d'un certain décalage. Reprenons brièvement les trois premiers critères et appliquons-les à la politique internationale menée par les Etats-Unis. Premier critère : à moins de critiquer la légitimité du Président et du Congrès, les États-Unis remplissent ce critère. Deuxième critère : si ce critère inclut la possibilité d'une action préventive, on ne peut s'empêcher de relever l'abîme qui sépare d'un côté la notion de «tort incontestable, grave et durable» à celle de «menace émergente non encore pleinement éclose». Troisième critère : Dieu seul lit dans les coeurs et peut juger de la rectitude d'une intention, mais tout en restant prudent, il faut cependant relever que plusieurs éléments géopolitiques ne semblent pas entrer dans le cadre de ce critère. De plus, et contrairement à ce que laissent entendre les discours officiels sur la guerre chirurgicale, la modération dans la destruction n'a pas toujours été à l'ordre du jour (cf. les euphémistiques dommages collatéraux).
Ce petit travail de comparaison pourrait être poursuivi, mais les éléments relevés suffisent déjà à constater qu'à moins d'être de fort mauvaise foi, les États-Unis ne peuvent se fonder sur la doctrine chrétienne de la guerre juste pour légitimer leur politique internationale. Or, le besoin de légitimation du discours et de l'action demeure ; la «légitimation» existe, mais c'est ailleurs qu'il convient de la chercher.
3. Quelle légitimation ?
Bien que se réclamant de la foi chrétienne, le Président Bush ne s'appuie pas sur la doctrine chrétienne traditionnelle pour légitimer son discours et sa pratique politiques. La vision du monde qui fonde son système se trouve au confluent de deux courants de pensée très importants : le premier est le millénarisme américain, le second la conception hégélienne de l'histoire. Dans cette partie, nous allons tenter de montrer comment ces deux courants de pensée fondent les points discutés dans la première partie du présent article. Notre approche ne sera pas psychologique, dans le sens où elle ne tentera pas d'établir jusqu'à quel point l'adhésion de l'auteur de la Stratégie à ces systèmes de pensée est consciente ; elle ne sera pas sociologique non plus, dans le sens où nous ne chercherons pas à mesurer le degré d'adhésion du peuple américain à la Stratégie. Nous nous tiendrons au niveau de l'analyse théologique et philosophique. Nous verrons enfin, dans la dernière partie, quelles peuvent être les conséquences pratiques de l'adoption de ces systèmes.
3.1. Le millénarisme américain
Pour comprendre ce qu'est le millénarisme américain, il convient d'opérer un détour théologique et de remonter aux promesses que Dieu adressa à Abram au moment de faire alliance avec ce patriarche :
Va-t'en de ton pays, de ta patrie et de la maison de ton père, vers le pays que je / te montrerai. Je ferai de toi une grande nation et je te bénirai ; je rendrai ton nom grand. Deviens donc une source de bénédiction. [...] L'Eternel apparut à Abram et dit : Je donnerai ce pays à ta descendance (Ge 12. 1-2 et 7a. On retrouve des promesses similaires au chapitre 17 de la Genèse).
Sans entrer dans une analyse détaillée de cet extrait, relevons le caractère triple de la promesse de Dieu : Abram allait devenir le père d'une grande nation (Israël), qui allait hériter d'une terre (le pays de Canaan), le tout en vue de devenir une source de bénédiction.
L'Eglise antique, médiévale et du temps de la Réforme a très majoritairement interprété la venue du Christ et l'ouverture du salut aux nations qui l'accompagnent comme la réalisation de la troisième promesse faite à Abraham, celle d'être une source de bénédiction pour toutes les nations. Ainsi, la vocation du peuple d'Israël était d'être un peuple saint, mis à part pour Dieu, pour permettre la venue sur terre du Messie : là résidait sa principale raison d'être en tant que peuple terrestre habitant une région déterminée. Une fois cette vocation accomplie, Israël en tant que nation terrestre perd son rôle premier et cesse d'occuper les devants de l'histoire du salut, pour faire place à l'Eglise chrétienne :
Abraham crut à Dieu, et cela lui fut compté comme justice. Reconnaissez-le donc : ceux qui ont la foi sont fils d'Abraham. Aussi l'Ecriture, prévoyant que Dieu justifierait les païens par la foi, a d'avance annoncé cette bonne nouvelle à Abraham : Toutes les nations seront bénies en toi ; de sorte que ceux qui ont la foi sont bénis avec Abraham le croyant (Gai. 3. 6-9).
L'Eglise du premier siècle était essentiellement composée de Juifs et ce n'est que petit-à-petit que les païens devinrent majoritaires. Mais ce fait importait peu, puisque l'appartenance au peuple de Dieu reposait dès lors non plus sur une filiation terrestre mais sur la confession de la Foi. De plus, la notion de Terre promise, si importante au temps d'Abraham, fut remplacée par une vision qui englobe le monde entier :
Jésus s'approcha et leur [ndr. : ses disciples] parla ainsi : Tout pouvoir m'a été donné dans le ciel et sur la terre. Allez, faites de toutes les nations des disciples, baptisez-les au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, et enseignez leur à garder tout ce que je vous ai prescrit. Et voici : je suis avec vous jusqu'à la fin du monde (Mt. 28. 18-20).
Pour comprendre ce qu'est le millénarisme américain, il convient encore de s'arrêter sur une question d'eschatologie (qui concerne la fin des temps). L'Eglise antique, médiévale et du temps de la Réforme a très généralement affirmé que si le Royaume a été révélé par la personne et l'œuvre de Jésus-Christ, il ne connaîtra sa pleine manifestation qu'à la fin des temps. Dans cette perspective, la parabole de l'ivraie a toujours joué un rôle important (Mt. 13. 24-30) : la séparation définitive du bien d'avec le mal n'aura lieu qu'à la fin des temps. D'ici là, ces réalités sont inévitablement et toujours mélangées.
Le millénarisme est une doctrine théologique qui s'éloigne de cet enseignement classique de l'Eglise et qui postule l'existence d'une période à venir de mille ans, appelée millenium, pendant laquelle Satan sera lié et le Royaume de Dieu connaîtra une pleine manifestation. Cette théorie se base principalement sur une interprétation littérale des versets bibliques suivants :
Puis je vis descendre du ciel un ange qui tenait la clef de l'abîme et une grande chaîne à la main. Il saisit le dragon, le serpent ancien, qui est le diable et Satan, ; et il le lia pour mille ans. Il le jeta dans l'abîme, qu'il ferma et scella au-dessus de lui, afin qu'il ne séduise plus les nations, jusqu'à ce que les mille ans soient accomplis (Ap. 20. 1-3)6.
On distingue habituellement deux types de millénarismes : le prémillénarisme, qui stipule que le Christ reviendra pour exercer personnellement un règne terrestre de mille ans depuis Jérusalem (après quoi viendra la fin des temps), et le postmillénarisme, qui envisage d'abord un âge d'or de mille ans, qui sera directement suivi du retour en gloire du Christ.
Par millénarisme américain, nous cherchons à définir un postmillénarisme particulier qui remonte à la création même de ce pays. Voici comment il s'articule : on reprend la structure de la triple promesse de Dieu faite à Abraham (un peuple saint sur une terre sainte en vue d'une bénédiction universelle) et on l'applique aux États-Unis. Le peuple élu est alors le peuple américain, la terre promise correspond au territoire du Nouveau Monde et la promesse de bénédiction universelle consiste non en l'avènement du Messie, comme dans l'Ancien Testament, mais en l'entrée dans cet âge d'or de mille ans qui précède le retour en gloire du Christ, conformément aux théories millénaristes7.
A partir du XIXe siècle, ce millénarisme va se séculariser et perdre progressivement son contenu religieux. L'idée du règne millénaire de Dieu va être remplacée par celle du règne de l'Homme, de sa Liberté et de ses Droits. La structure religieuse de cette pensée ne va cependant pas se perdre : les États-Unis resteront la nation élue dans le but de travailler à l'avènement du millenium, à cette ère de liberté et de plein épanouissement des individus et des sociétés.
L'histoire des États-Unis fourmille d'exemples qui illustrent la perception messianique que ce pays a de lui-même. Voici deux extraits parmi tant d'autres :
Dieu n'a pas préparé les peuples Anglo-saxons depuis mille ans pour qu'ils s'adonnent à une vaine et stérile auto-admiration. Non. Il a fait de nous les maîtres organisateurs du monde dans le but d'établir des systèmes d'ordre là où régnait le chaos. Il nous a donné un esprit de progrès pour triompher des forces de la réaction au travers du monde. Il nous a fait exceller en gouvernement, de telle sorte que nous puissions organiser le gouvernement de peuples sauvages et séniles. S'il n'existait pas une telle force, le monde sombrerait à nouveau dans la barbarie et la nuit. Et, au sein de l'espèce humaine, Dieu a marqué les Etats-Unis comme sa nation choisie pour enfin conduire la rédemption de ce monde 8. Et, plus près de nous, le Président Wilson parlant de la Première Guerre mondiale : «L'Amérique a eu le privilège infini d'accomplir sa destinée et ainsi de
sauver le monde9.» Et, encore plus près de nous, George W. Bush, dans sa Stratégie... : La liberté est une condition impérative, non négociable, de la dignité humaine, le droit inné de tout membre de toute civilisation. Au fil de l'histoire, la liberté a été menacée par les guerres et par la terreur ; elle a subi l'assaut de l'affrontement des volontés des États puissants et des projets maléfiques des tyrans ; elle a été mise à l'épreuve par la pauvreté et la maladie largement répandues. Aujourd'hui, l'humanité tient en main la possibilité d'affirmer le triomphe de la liberté sur tous ces ennemis. Les États-Unis accueillent sans hésiter leur responsabilité de diriger cette grande mission. Ainsi, une première légitimation du discours et de l'action politiques américains repose sur l'accumulation de deux erreurs théologiques : la première réside dans une
compréhension millénariste de la fin des temps (dans sa version religieuse ou sécularisée), la seconde dans la récupération et la transposition à l'Amérique et au millenium des promesses faites à Abram aux temps de l'Ancienne Alliance. Le millénarisme repose sur une mauvaise compréhension de la nature du Royaume de Dieu jusqu'au retour en gloire du Christ : si le règne du Christ est bien réel aujourd'hui déjà, il ne sera cependant pleinement manifesté qu' à son retour en gloire. Le bon grain et l'ivraie ne seront séparés qu'à la fin des temps et pas avant. D'ici là, les chrétiens ont à travailler activement à la manifestation du Royaume dans tous les domaines de la vie, tout en sachant que la pleine réalisation de cette oeuvre n'aura lieu qu'au renouvellement de toutes choses. Pour ce qui est de la transposition à l'Amérique des promesses faites à Abram, cette erreur repose sur une mauvaise compréhension de l'histoire de l'Alliance. Si l'Alliance de Dieu est fondamentalement une, elle n'en évolue pas moins au cours de l'histoire. Ainsi, la situation très particulière du peuple d'Israël dans l'histoire du salut est un phénomène unique en vue de l'incarnation du Sauveur : aucune transposition littérale ultérieure de cette situation n'est théologiquement défendable.
De ces deux erreurs découlent naturellement plusieurs éléments développés dans la Stratégie. Le premier est celui de l'Amérique comme nation élue, ayant une mission à accomplir. Ce fait transparaît à plusieurs reprises dans le document étudié, et notamment dans l'extrait ci-dessus. Le deuxième élément réside dans une vision manichéenne du monde : d'un côté les bons qui incarnent le Bien, de l'autre les méchants le Mal. On comprend dès lors aisément pourquoi il n'y a pas de place pour des pays neutres dans le système, et pourquoi les Etats-Unis s'arrogent d'importants droits avec leur conception du terrorisme et leurs développements relatifs à la guerre préventive.
3.2. La conception hégélienne de l'histoire
Si la première légitimation du discours et de l'action politiques américains est essentiellement théologique, la seconde est philosophique. Elle réside dans l'adoption de la philosophie de l'histoire développée au début du XIXe siècle par le philosophe allemand Georg W. F. Hegel. Après avoir présenté et commenté quelques extraits de son oeuvre fondamentale sur le sujet, La Raison dans l'histoire 10, nous montrerons en quoi la Stratégie s'inspire de cette oeuvre.
La pensée de Hegel est complexe, souvent obscure et fort diversement interprétée par ses commentateurs, ce qui ne facilite pas son exposition : le lecteur devra donc s'armer de patience. Il est une notion à saisir pour comprendre la philosophie de l'histoire de ce philosophe : il s'agit de celle d'Esprit. L'Esprit est en quelque sorte le dieu de Hegel tel que l'Histoire le révèle. Commençons par examiner quelle est la nature de cet Esprit : La nature de l'Esprit se laisse connaître par son opposé exact. Nous opposons l'Esprit à la matière. De même que la substance de la matière est la pesanteur, de même la liberté est la substance de l'Esprit. Nous sommes tous immédiatement convaincus qu'une des propriétés de l'Esprit est la liberté ;
mais la philosophie nous montre que toutes les propriétés de l'Esprit ne subsistent que grâce à la liberté, qu'elles ne sont toutes que des moyens de la liberté, que toutes la recherchent et la produisent (p. 75).
On retrouve dans cet extrait une erreur fondatrice de la Modernité : la vision dualiste du monde, avec d'une part le monde matériel, physique, intégralement soumis aux lois nécessaires (donc non libres) de la physique, de la chimie et de la biologie et d'autre part, le monde de la pensée ou de l'esprit qui ne connaît aucune limite, qui est liberté pure. La nécessité matérielle est ainsi opposée à la liberté de l'esprit.
La pensée de Hegel présente malgré cela un aspect original : c'est la manière dont le dieu du système - l'Esprit - est intimement lié au devenir historique. Alors qu'habituellement, les philosophes affirmaient que l'Etre premier est ceci ou cela, Hegel vas' attacher à développer la thèse selon laquelle cet Etre premier est lui-même sujet au devenir, qu'il utilise l'histoire pour s'auto-ré vêler : «On peut dire que l'histoire universelle est la présentation de l'Esprit dans son effort pour acquérir le savoir de ce qu'il est en soi (p. 83).» L'histoire est le catalyseur de l'auto-révélation progressive de l'Esprit : c'est au travers de l'histoire que le dieu du système, l'Esprit, prend conscience de ce qu'il est vraiment («en soi») et accède ainsi à la plénitude de sa divinité ". Ainsi, l'Etre premier n'est pas, il devient. Cette tournure de pensée bouscule passablement d'habitudes intellectuelles héritées de la pensée grecque ou chrétienne. Alors que les grecs (à l'exception d'Heraclite) pensent avant tout en terme d'essences (ce qu'est une chose en soi), Hegel médite avant tout sur le devenir. Alors que la foi chrétienne stipule que Dieu se révèle dans l'histoire tout en lui restant extérieur (il est transcendant, nulle créature ne peut le contenir ; il est pleinement auto-suffisant et n'a pas besoin de l'histoire pour parvenir à une plus grande plénitude de son être), Hegel voit en l'histoire la manifestation progressive de son dieu, comme si Dieu se faisait dans et par l'histoire. On assiste donc à une divinisation du processus historique évolutif : tout ce qui arrive est dieu. L'hégélianisme est une forme historicisée de l'idolâtrie panthéiste si chère au cœur de l'homme.
Cette prise de conscience qu'a l'Esprit (qui est parfois nommé l'Esprit du Monde) de lui-même au cours de l'histoire ne se fait pas tout seul mais par le biais de ce que Hegel nomme l'Esprit du peuple. Tous les peuples de l'histoire participent, sous la forme particulière de leur esprit propre (qui se manifeste dans leur système juridique et politique, leurs arts, etc.), à l'auto-révélation de l'Esprit du Monde.
Les Esprits populaires à leur tour se distinguent selon la représentation qu'ils se font d'eux-mêmes, selon la superficialité ou la profondeur avec laquelle ils ont saisi l'Esprit. L'ordre éthique des peuples et son droit constituent la conscience que l'Esprit a de lui-même (p. 80).
Ce n'est donc pas seulement le devenir historique qui devient dieu, mais également l'homme et sa raison, par le biais de ses productions culturelles 12. En cela, Hegel s'inscrit dans la droite ligne de la pensée moderne.
Ces Esprits des peuples ne sont pas tous égaux : «à chaque époque domine le peuple qui a saisi le plus haut concept de l'Esprit (p. 91).» Ce fait débouche sur une vision téléologique (orientée vers un but) de l'histoire qu'Hegel présente de la façon suivante :
Les Orientaux ne savent pas que l'Esprit ou l'homme en tant que tel est en soi-même libre. Parce qu'ils ne le savent pas, ils ne le sont pas. [...] La conscience de la liberté s'est levée d'abord chez les Grecs, c'est pourquoi ils furent libres. Mais les Grecs, tout comme les Romains, savaient seulement que quelques-uns sont libres, non l'homme en tant que tel. [...] Ce sont les nations germaniques qui, les premières, sont arrivées, par le Christianisme, à la conscience que l'homme en tant qu'homme est libre, que la liberté spirituelle constitue vraiment sa nature propre (pp. 83-84).
Plus loin dans son ouvrage, Hegel affirmera que «l'Amérique est le pays de l'avenir», mais «comme la philosophie ne s'occupe pas de prophéties (p. 242)», il ne développera pas ce thème. A tour de rôle, mais avec toujours plus de profondeur, des peuples travaillent à la réalisation de ce but de l'histoire universelle. Cette vision débouche sur la création de la notion de peuple universal-historique. Voici l'explication qu'en donne K. Pomian :
Un peuple est universal-historique quand il exprime l'Esprit du Monde, quand, tout en gardant sa particularité, il s'avère être porteur de l'universel, incarnation d'un principe dont l'accomplissement est nécessaire à l'avancée de l'esprit, de sa connaissance de soi et de sa liberté, c'est-à-dire au progrès du genre humain pris comme s'il ne faisait qu'un. En ce sens, c'est un peuple dominant et c'est pourquoi son entrée sur la scène de l'histoire fait époque ; les autres peuples, eussent-ils été dominants précédemment, perdent leurs droits, ne comptent plus dans 1 ' histoire du monde. Autrement dit, ils restent là, ils vivent divers événements, mais tout cela n'a plus aucune importance du point de vue de l'histoire universelle qui peut les abandonner à leur destin u.
Ainsi, selon Hegel, l'Esprit du monde s'incarne en différents esprits populaires pour s'auto-révéler progressivement. Tout ce processus d'auto-révélation a un sens, sens qui dépend directement de la nature même de l'Esprit :
La substance de l'Esprit est la liberté. Par là est indiqué aussi le but qu'il poursuit dans le processus de l'histoire : c'est la liberté du sujet, afin que celui-ci acquière une conscience morale, afin qu'il se donne des fins universelles, qu'il les mette en valeur ; c'est la liberté du sujet, afin que celui-ci acquière une valeur infinie et parvienne au point extrême de lui-même. C'est là la substance du but que poursuit l'Esprit du monde et elle est atteinte par la liberté de chacun (p. 85).
L'histoire possède donc un sens et celui-ci est directement lié à l'avènement de la liberté - donc de l'Esprit - dans le monde 14. Ce fait débouche sur une vision grandiose - pour ne pas dire délirante - du processus historique, puisque ce n'est à rien d'autre qu'à la naissance perpétuelle de dieu que nous assistons. Les hauts lieux de l'histoire, tout comme les drames les plus terribles, s'intègrent dans ce processus plus général d'avènement de l'Esprit :
L'histoire universelle est la manifestation du processus divin absolu de l'Esprit dans ses plus hautes figures : la marche graduelle par laquelle il parvient à sa vérité et prend conscience de soi. Les peuples historiques, les caractères déterminés de leur éthique collective, de leur constitution, de leur art, de leur religion, de leur science, constituent les configurations de cette marche graduelle. Franchir ces degrés, c' est le désir infini et la poussée irrésistible de l'Esprit du Monde, car leur articulation aussi bien que leur réalisation est son concept même. Les principes des Esprits populaires, dans la série nécessaire de leur succession, ne sont eux-mêmes que les moments de l'unique Esprit universel : grâce à eux, il s'élève dans l'histoire une totalité transparente à elle-même et qui en apporte la conclusion (pp. 97-9Cool. La divinisation du processus historique est évidente et la fin de l'histoire coïncide avec l'avènement de l'Esprit du monde comme "totalité transparente à elle-même".
Voilà qui est fort éloigné de la conception chrétienne de l'histoire, qui voit en celle-ci le théâtre de l'action de la Providence divine, et non le spectacle de la naissance de Dieu lui-même.
Les idées ont toujours des conséquences. Le fait d'adhérer à la conception hégélienne de l'histoire aura d'importantes répercussions sur la manière d'envisager l'action politique. Le philosophe français Jean Brun l'a fort bien relevé dans des pages consacrées à la pensée de Hegel :
L'intronisation de l'Histoire dans tous les domaines revient à la sacraliser et à affirmer qu'il n'y a pas de crimes de l'Histoire mais seulement des crimes devant l'Histoire ; au nom du «sens de l'Histoire» et de lafelix culpa, on sera conduit à angéliser une « bonne » violence et à condamner une « mauvaise » violence ; ce manichéisme réapparaît aussi bien dans les théories nazies que dans les théories communistes de l'Etat qui ont en outre en commun de condamner l'individualisme et d'angéliser leur révolution. Toutes idées que l'on pourrait d'ailleurs retrouver dans les «théologies de la libération» qui veulent se mettre au service d'un Dieu confondu avec l'humanité, qui pensent que l'action remplace la grâce et que l'« insurrection chrétienne » doit se mettre au service d'un sens de l'Histoire qui va dans le sens d'une libération de l'homme '5.
Cet extrait contient plusieurs éléments importants. Contentons-nous de relever d'une part que la vision hégélienne de l'histoire rendra possible le développement d'une action politique arbitraire : celle-ci ne sera plus liée à certaines normes morales fixes et durables, valables pour tous. Le "sens de l'histoire" remplacera ces normes et déterminera la bonté d'une action. Ainsi, une même action pourra être bonne ou mauvaise selon qu'elle va dans le sens de l'histoire ou pas (étant entendu que cette notion de «sens de l'histoire» est malléable à merci, en fonction des projets de tel gouvernement ou de tel groupe de pression). D'autre part, cette vision des choses conduit à une glorification de l'action : il faut agir coûte que coûte pour permettre l'auto-révélation de l'Esprit.
Il est temps, après ce long détour, de revenir à l'étude de la Stratégie. Le lecteur attentif décèlera en son sein plusieurs extraits inspirés par la conception hégélienne de l'histoire. En voici quelques exemples :
L'histoire jugera sévèrement ceux qui ont vu ce danger apparaître et qui se sont abstenus d'agir. Dans le monde nouveau où nous venons de pénétrer, la seule voie de la paix et de la sécurité est la voie de l'action.
En défendant la paix, nous profiterons également de la possibilité historique de maintenir la paix. Aujourd'hui, la communauté internationale voit s'offrir la meilleure possibilité depuis l'avènement de l'Etat-nation au XVIIe siècle d'établir un monde où les grandes puissances sont en concurrence dans la paix au lieu de se préparer continuellement à se faire la guerre. [...]
Enfin, les États-Unis tireront parti des possibilités qui s'offrent à eux en cette conjoncture pour étendre les bénéfices de la liberté au monde entier. Nous nous emploierons à porter l'espoir de la démocratie, du développement, des libres-marchés et du libre-échange aux quatre coins du monde. [...] Les États-Unis se tiendront aux côtés de tout pays déterminé à bâtir un avenir meilleur en cherchant à offrir les avantages de la liberté à son peuple. On retrouve notamment l'idée d'une histoire divinisée qui «jugera sévèrement», comme l'Eternel-Dieu lors du Jugement dernier ; celle du primat de l'action politique qui est la «seule voie de la paix et de la sécurité» ; celle de vivre une étape particulière du processus historique (la fin de 1 ' histoire ?), où la liberté sera enfin manifestée dans toutes les sphères de l'existence humaine (privée, publique avec la démocratie, économique avec le libre-échange, etc.) ; celle, à peine voilée, des États-Unis dans le rôle de la nation universal-historique. Cette compréhension des États-Unis comme nation phare, pays catalyseur de l'avènement de la liberté politique et économique au travers du monde présente de très fortes résonnances hégéliennes pour qui a l'oreille formée.
Cet arrière-plan hégélien explique bien mieux le discours et l'action politiques américaines que ladoctrine chrétienne de la guerre juste. Ce fait ne manque pas d'étonner, quand on sait avec quelle vigueur le Président Bush se revendique de
la foi chrétienne. Il ne manque pas non plus d'inquiéter, quand on sait que l'hégélianisme a pu fonder théoriquement certaines facettes des deux idéologies politiques les plus meurtrières que les hommes aient inventées, le nazisme (où
c'est le peuple allemand qui se voit investi d'une mission historique) et le communisme (où cette fois-ci, c'est le prolétariat). Comme le relève Jean Brun : Lorsque les manichéismes politico-philosophiques parlent de l'hégélianisme, ils
distinguent traditionnellement un hégélianisme de droite, qui aurait engendré toutes les idolâtries nationalistes de l'Etat, et un hégélianisme de gauche, qui se serait prolongé dans Feuerbach pour aboutir à Marx. On oublie ainsi que l'hégélianisme ne se situe pas d'un côté ou de l'autre, quelles qu'aient pu être les utilisations qu'on en ait fait, il se situe là en ce moment de l'histoire de l'Histoire où l'homme devient le collaborateur de Dieu, et Dieu le collaborateur de l'homme, au sein de ce Grand Oeuvre qu'est l'histoire de l'Absolu 16. La Stratégie fonde un nouveau type de Théologie de la libération, non dans son
acception marxiste-léniniste à laquelle nous avons été habitués ces dernières décennies, mais dans sa version droit de l'hommiste et libre-échangiste. La nation universal-historique, l'Amérique, se doit de travailler partout dans le monde à
l'auto-manifestation de l'Esprit, qui est liberté absolue. Et en tant que peuple universal-historique, rien ne peut ni ne doit lui résister.
Conclusion
Le millénarisme américain et la conception hégélienne de l'histoire sont deux confluents qui finissent par former un tout relativement homogène sensé légitimer l'action politique internationale des États-Unis. Le mélange est surprenant et mériterait à lui seul une étude, mais le cadre de cet article nous oblige à nous contenter de constater le fait. Ce mélange est également redoutable : il arrive parfois que deux erreurs s'entre-annulent et demeurent sans grands effets pratiques. Dans ce cas précis, elles ont plutôt un effet multiplicateur l'une sur l'autre, l'erreur théologique venant renforcer l'idolâtrie philosophique et vice-versa, toutes deux incitant - à des degrés divers - à la confusion des domaines naturel et surnaturel et développant une conception de la nature et du sens de l'histoire erronée.
Ce fait appelle une réflexion relative à la relation qui unit la pensée à l'action. Dans le cas qui nous occupe, il est à souhaiter que les États-Unis ne soient pas cohérents dans l'application de leur système de pensée. Le millénarisme américain, appliqué jusqu'au bout, pourrait servir à justifier une conduite de la guerre proche de celle d'Israël au temps de la conquête de la Terre promise. La conception hégélienne de l'histoire peut, quant à elle, servir à légitimer quasi n'importe quelle action politique et militaire, preuve en est l'histoire du XXe siècle. Dieu, dans sa providence, permet souvent que les hommes n'appliquent pas de façon cohérente leur système de pensée à la réalité. C'est là un aspect de la grâce générale : si toutes les idées fausses connaissaient une pleine application, ce serait l'enfer sur terre. La réalité, avec son épaisseur propre, exerce souvent un frein sur l'homme, même malgré lui. Le moyen de sortir de cette situation dangereuse réside à nos yeux dans la redécouverte et surtout la mise en oeuvre de la doctrine chrétienne de la guerre juste. Ainsi épuré de ces erreurs, le christianisme affiché de l'administration Bush serait plus crédible et plus mûr. Il rendrait également possible un usage de la force (qui en soi est une vertu) soumis à un exercice prudent et mesuré de la raison. Voici comment Olivier Delacrétaz conclut son article consacré à ce sujet, conclusion que nous faisons nôtre, tant elle nous semble toucher au coeur du sujet que nous avons tenté de développer au cours du présent article :
A l'époque de saint Thomas, les causes terrestres, même les plus importantes étaient des biens éminemment relatifs en regard de la Cause première de toutes choses, en regard aussi du salut des âmes. Une cause pouvait être juste et
néanmoins le prince reculer devant la guerre parce que le critère de la proportionnalité, par exemple, n'était pas assuré : avoir raison ne légitimait pas tout. Aucune cause temporelle n’engageait absolument. L'absolu était hors du monde.
Aujourd'hui, l'absolu est dans le monde, sous des formes tout à fait terrestres –la race ou l'ethnie, le peuple ou la nation, les droits de l'homme, la démocratie, le marché, les intérêts vitaux de telle puissance. Chacune de ces causes est considérée comme tellement juste par ses partisans qu'elle en absorbe les autres critères. Le président Bush croit fermement mener une guerre juste, non certes selon les critères traditionnels, mais directement aux yeux de Dieu. Le fait que sa cause soit juste lui suffit. Il lui donne le droit de recourir aux moyens les plus disproportionnés. Et ne parlons pas de l'intention droite qu'il vise, en fin de compte, à vouloir le bien même de l'adversaire ! L'adversaire, aujourd' hui, c' est l'Axe du Mal, ou le grand Satan. Il doit être écrasé et ce qu'il en reste doit se rendre sans conditions. La doctrine de la guerre juste n'est pas caduque. Elle reste une approche
pertinente du point de vue de la morale politique, un éclairage raisonnable permettant à l'homme d'Etat chrétien - ou simplement de bon sens et de bonne volonté - déjuger si, objectivement et subjectivement, la guerre qu'il envisage de
mener en vaut la peine. Mais on tend aujourd'hui, mélangeant arbitrairement les domaines spirituel et temporel, à lui substituer une rhétorique de la guerre juste débouchant sur l'exact contraire : la justification et l'aggravation des horreurs de
la guerre 17.


Notes
1 Le texte est disponible sur l'Internet notamment à l'adresse suivante : www.usembassy.be/fr/frpolicy/fr.bush.092502.htm
2 Principe qui est en soi légitime. Lire à ce propos l'article de Jean-Marc Berthoud, « Les nations : une malédiction ? » in ONU ? Non !, Lausanne, Cahiers de la Renaissance Vaudoise, 2002.
3 Ce refus du concept de neutralité n'est pas nouveau chez les Américains. Lors de l'entrée des États-Unis dans la Première Guerre (2 avril 1917), le Président Wilson déclara : "La neutralité n'est plus praticable ni désirable lorsque la paix dans le monde est en cause." Cité par Jean-Jacques Langendorf, "Grandeur et scandale de la neutralité" in Les conditions de la survie, Lausanne, Cahiers de la Renaissance vaudoise, 2002, p. 193.
4 Point numéro 38 de L'Europe et la nouvelle stratégie de sécurité nationale des États-Unis, rapport de l'Assemblée Interparlementaire européenne de sécurité et de défense publié le 4 juin 2003. Le texte est disponible sur l'Internet à l'adresse suivante : www.assembly-weu.org/fr/documents ordinaires/rpt/2003/1819.html
5 Olivier Delacrétaz, "Remarques sur la guerre juste" in La Nation, 21 mars 2003, numéro 1702.
6 L'interprétation non millénariste de ces versets consiste à dire que le chiffre mille est à comprendre de façon symbolique (plénitude) et que cette période est celle qui sépare les deux venues du Christ, période pendant laquelle le salut est ouvert à toutes les nations ("afin qu'il ne séduise plus les nations").
7 Il existe un livre très intéressant consacré à ce sujet : Ernest Lee Tuveson, Redeemer Nation : The Idea of America's Millenial Rôle, Chicago, The University of Chicago Press, 1968.
o
8 Albert J. Beveridge (début du XIXe siècle), cit. in ibid., p. vii.
9
Citation in Ibid, page de titre intérieure. Les deux citations sont traduites par nos soins.

10 Georg Wilhelm Friedrich Hegel, La Raison dans l'histoire, Paris, 10/18, 1979.
11 Hegel insiste beaucoup sur l'importance de ce caractère réflexif de l'Esprit dans un extrait difficile mais important : "En tant qu'Esprit l'homme n'est pas un immédiat mais essentiellement un être qui retourne à soi. Ce mouvement de médiation est un moment essentiel de l'Esprit. Son activité consiste à sortir de l'immédiateté, à la nier et à revenir ainsi en soi. Il est donc ce qu'il se fait par son activité. Le sujet, la véritable réalité, est seulement ce qui est rentré en soi. L'Esprit doit être compris uniquement comme son propre résultat (p. 7Cool." L'idée est qu'un être capable de réflexivité, de retour sur soi, est supérieur à celui qui vit dans l'immédiateté pure. L'histoire est donc cette médiation par laquelle l'Esprit opère ce retour sur lui-même et gagne par là même en plénitude.
12 Rousas J. Rushdoony, dans ses ouvrages The One and thé Many (Fairfax, Thoburn Press, 1978) et The Death ofMeaning (Vallecito, Ross House Books, 2002) met bien ce fait en évidence.
14
13 Krzysztof Pomian, L'ordre du temps, Paris, Gallimard, 1984, p. 135.
Voici comment F. Fukuyama, auteur d'un essai d'inspiration hégélienne qui a fait couler beaucoup d'encre en son temps et intitulé La Fin de l'histoire et le dernier homme (Paris, Champs / Flammarion, 1992), décrit cette fin de l'histoire : "Hegel avait défini l'histoire comme la progression de l'homme vers de plus hauts niveaux de rationalisme et de liberté, et ce processus avait un point final logique avec la réalisation de l'autonomie absolue de la conscience. Celle-ci, pensait-il, était incarnée dans l'État libéral moderne, apparu en Europe à la suite de la Révolution française et en Amérique à la suite de l'Indépendance des États-Unis (p. 90)."
15 Jean Brun, L'Europe philosophe, Paris, Stock, 1991, p. 275.
Jean Brun, Philosophie de l'histoire, Paris, Stock, 1990, pp. 178-179.
Olivier Delacrétaz, art. cit.
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